Si la nouvelle caricature de Mahomet provoque de nombreuses critiques dans certains pays musulmans, quelques uns ont tout simplement choisi d'interdire sa parution.
En France, les exemplaires de Charlie Hebdo se sont arrachés dès sa sortie en kiosque mercredi matin. Imprimé à cinq millions d'exemplaires et en plusieurs langues, il provoque de vives critiques dans de nombreux pays, qui ont répété leur opposition à ce que le prophète de l'islam soit représenté. Certains d'entre eux ont de leur côté pris le parti de l'interdire. Tour d'horizon des pays en question.
>> Une carte des pays où Charlie Hebdo a été officiellement interdit :
Absent au Maghreb. Malgré les condamnations de l'attentat, Charlie Hebdo ne sera pas présent en Algérie, en Tunisie et au Maroc. Dans le royaume chérifien, l'interdiction en kiosque n'est pas vraiment une surprise : le Maroc avait refusé de participer dimanche à la marche à Paris, "en raison de la présence de caricatures blasphématoires" du prophète dans le défilé. Cette interdiction vaut également pour les autres journaux relayant la Une de Charlie Hebdo. Le Monde, Libération et Marianne ont donc eux aussi été interdits.
Même absence en Tunisie, où le quotidien avait brièvement été vendu après la révolution de 2011. "S’il existe des caricatures offensantes au prophète, nous refuserons la distribution de l’hebdomadaire", a fait savoir le responsable de la distribution des journaux et magazines étrangers en Tunisie au site Webdo, cité par Le Monde.
Quant à l'Algérie, pays dont l'islam est religion d'Etat, Charlie Hebdo y sera également introuvable. Mais comme le précise RFI, le journal satirique s'y fait en règle générale très rare. Et comme au Maroc et en Tunisie, Marianne est également interdit.
>> LIRE AUSSI - Al-Qaïda au Yémen revendique l'attentat contre Charlie Hebdo
Interdit au Sénégal. Le Sénégal, à forte majorité musulmane, a prohibé la diffusion "par tout moyen" de l'hebdomadaire satirique et de Libération qui a reproduit la une de son confrère. Après sa participation à la marche parisienne dimanche, le chef de l'Etat, Macky Sall, s'est en effet attiré de nombreuses critiques. Un billet du journal privé Le Quotidien lundi soulignait que les dirigeants africains présents "ont voulu se donner une bonne image de protecteurs de droits et libertés", alors que chacun, y compris Macky Sall, "a des dossiers de violations des libertés élémentaires dans son propre pays".
Conspué en Iran, en Egypte, et au Pakistan. En Egypte, Al-Azhar, principale autorité de l'islam sunnite basée en Egypte, a appelé les musulmans à "ignorer" cette "frivolité haineuse". Même déclaration en Iran, qui a qualifié la couverture de Charlie Hebdo d'"insultante". Au Pakistan, deuxième pays musulman le plus peuplé au monde avec près de 200 millions d'habitants, les parlementaires ont dénoncé à l'unanimité la publication d'une nouvelle caricature "blasphématoire". "Les médias qui ont publié ces croquis devraient être interdits, toutes les copies devraient être confisquées et brûlées", a déclaré le ministre fédéral des Affaires religieuses, Sardar Yousaf.
Une caricature qui encourage le terrorisme pour le Hezbollah. Le mouvement chiite libanais, qui avait condamné l'attentat contre Charlie Hebdo, a estimé que la nouvelle caricature de Mahomet pouvait conduire à "plus d'extrémisme". "C'est un acte qui contribue directement à aider le terrorisme, l'extrémisme et les fondamentalistes", estime la formation islamiste dans un communiqué.
Au Kenya, un quotidien s'excuse d'avoir reproduit la Une. Un quotidien kényan s'est excusé jeudi d'avoir reproduit, la veille, la Une du journal satirique français. "De nombreux lecteurs musulmans se sont plaints", a expliqué le quotidien The Star. "The Star regrette sincèrement d'avoir blessé et peiné avec ce dessin et tiendra compte à l'avenir de la sensibilité des musulmans", ajoute le quotidien.
Le cas turc. Dans les pays musulmans, seul le quotidien d'opposition turc Cumhuriyet fait exception. Bravant les mises en garde et les pressions, le journal a republié la une de Charlie Hebdo, ainsi qu'un encart en turc de quatre pages reprenant l'essentiel du numéro. L'affaire est devenue d'autant plus sensible en Turquie qu'un tribunal a ordonné mercredi le blocage des pages des sites qui publient la caricature de Mahomet.
>> A LIRE AUSSI - En Turquie, la une de "Charlie" interdite sur le web
Nombreuses manifestations. Condamnée par l'Union mondiale des oulémas musulmans comme par le mufti de Jérusalem, plus haute autorité religieuse dans les Territoires palestiniens, cette nouvelle Une a également provoqué des manifestations. Environ 1.500 personnes ont ainsi défilé contre Charlie Hebdo aux Philippines. Ils étaient aussi plusieurs centaines dans les rues de Nouakchott, en Mauritanie, pour protester contre l'hebdomadaire français.