Certains médias italiens parlent déjà de "fin du berlusconisme". Les élections municipales, dont le second tour a eu lieu dimanche et lundi, font figure de test électoral raté pour Silvio Berlusconi, empêtré dans plusieurs scandales. Six millions d’Italiens ont voté dans quelque 90 villes, mais ce sont surtout les résultats de Naples et de Milan qui sont scrutés par les observateurs. Or ces deux villes ont été remportées par la gauche.
Milan. Le candidat de la gauche Giuliano Pisapia est élu maire, avec 55,10% des voix, contre 44,89% à la maire sortante Letizia Moratti, soutenue par Silvio Berlusconi, selon les résultats définitifs communiqués par le ministère de l'Intérieur italien.
Les empires Berlusconi concentrés à Milan
Perdre Milan est dramatique pour le Cavaliere, dont la vie et la carrière, politique autant qu’économique, s’y concentrent. Le président du Conseil italien est d'ailleurs né, le 29 septembre 1936, à Milan.
Il y a bâti plusieurs empires : l’immobilier tout d’abord, il a construit Milano 2, un immense quartier résidentiel de la banlieue de Milan. La télévision, puisque le Cavaliere a commencé par reprendre une chaîne locale de cette ville en 1978, avant d’en faire une chaîne nationale, et d’installer Mediaset. La presse, car il contrôle, via sa holding familiale Fininvest, la grande maison d'édition milanaise Mondadori qui détient de nombreux titres. Le football enfin, puisqu’il est propriétaire de l’AC Milan depuis 1986.
La droite perd Arcore, fief du "bunga-bunga"
Et Milan est aussi le fief électoral de Silvio Berlusconi, depuis son entrée en politique en 1994.
Obligé de résider à Rome, il séjourne souvent en périphérie milanaise, dans la luxueuse villa d’Arcore, à la sulfureuse étiquette de lieu des parties de "bunga-bunga". Arcore que la droite a d'ailleurs perdu.
A Naples, un juge anti-corruption pour régler la crise des ordures
Naples. Ravir Naples, 3e ville du pays, à la municipalité de gauche sortante était l’un des objectifs de la campagne de Silvio Berlusconi. Raté : l’ex-magistrat Luigi de Magistris, candidat de centre-gauche, l’a largement emporté (65,37%) sur son adversaire de droite, l’entrepreneur Gianni Lettieri (34,62%). Ce dernier, pourtant en ballottage favorable au premier tour, a reconnu sa défaite.
Luigi de Magistris s'est spécialisé, tout au long de sa carrière d'ex-magistrat, sur la lutte anti-corruption. Il apparaît comme un recours entre la gauche historique, au pouvoir depuis des années à Naples, et la droite berlusconienne. Ni la gauche locale, ni le gouvernement de Berlusconi, n'ont en effet été capables de mettre un terme à la crise des ordures napolitaine.
Une défaite du nord au sud
Novare, Trieste, Cagliari. Dans ces trois villes, les candidats du centre-droit (berlusconistes) ont été battus par la gauche. A Novare, dans le Piémont, le nouveau maire, centre-gauche, Andrea Ballarè, avec 52,91% des voix, a mis fin à dix ans de gouvernement de centre-droit. A Cagliari, en Sardaigne, Massimo Zedda, centre-gauche, est le nouvel édile. Et à Arcore, en Lombardie, Colombo gagne, soutenu par le centre-gauche.
"A chaque fois que je perds, ma force est décuplée"
Silvio Berlusconi a tout de suite tenté de minimiser le désastre. "Le résultat n'aura pas d'effet sur le gouvernement", a-t-il assuré à des proches, en se disant certain du soutien de la Ligue du Nord, son alliée très implantée à Milan. De nombreux responsables de l'opposition ont déjà demandé la démission du président du Conseil.
Le Cavaliere s'est exprimé publiquement, quelques heures après la publication des résultats : il a reconnu sa défaite, jugeant son ampleur "évidente". "La seule façon d'avancer et de garder notre calme et de continuer", a-t-il claironné. "Je suis un battant et chaque fois que je perds, ma force est décuplée", a-t-il poursuivi. Enfin, le président du Conseil a assuré que la Ligue du Nord continuerait de le soutenir.
Le PdL dépoussiéré ?
Pour montrer qu'il tient la barre, il a convoqué un conseil des ministres dès son retour d'un sommet bilatéral à Bucarest mardi à 10 heures et une réunion de la présidence de son parti le PDL (Popolo della Libertà) qu'il veut relancer avec des états généraux, des primaires et le choix d'un nouveau nom, selon les journalistes italiens.
Et, en dépit de cette gifle électorale, Silvio Berlusconi a répété qu’il n’envisageait pas d’élections anticipées avant le printemps 2012