Le docteur Denis Mukwege aurait pu avoir une vie bien plus confortable que celle qu'il a choisie. Ce gynécologue congolais a créé, en 1999, un hôpital à Panzi, dans son pays natal, destiné à soigner les femmes victimes de viols. Aujourd'hui, au-delà de son devoir de médecin, il prend la parole pour dénoncer le viol comme arme de guerre.
"Il y a quelque chose qui dépasse l'entendement". Denis Mukwege raconte au micro d'Europe 1 l'horreur, parfois "surnaturelle" de ces actes. "Quand je vois le viol d'un bébé de 18 mois, je me dis que même les animaux ne font pas ça. Il y a quelque chose qui dépasse l'entendement", regrette-t-il.
"J'ai aujourd'hui l'impression que le viol fait beaucoup plus de dégâts que les armes conventionnelles", résume le médecin, au micro de Maxime Switek lundi. "Lorsque la famille est détruite à la suite d'un viol collectif, pour reconstruire cette famille, ça prend énormément de temps avec des résultats aléatoires", ajoute-t-il.
"Le viol devient une sorte de drogue pour eux". Très riche en minerais, le Congo est aujourd'hui "victime de sa richesse", estime le gynécologue. "Des groupes armés créent des espaces pour eux. Ils ne rendent de compte à personne", ajoute-t-il, précisant que ces groupes font appel à des enfants "à qui ils donnent des kalachnikov et leur disent de devenir des hommes. Le viol devient alors une sorte de drogue pour eux".
Ces groupes armés n'apprécient guère le travail du docteur Denis Mukwege, qui a été victime d'une tentative d'assassinat. "Avec ce que je vois tous les jours, je crois que ce serait inhumain de dire 'bon, j'arrête'", confie-t-il. Le gynécologue salue également la capacité de résilience des femmes qu'il soigne, "qui ont une capacité à reprendre la vie, que j'ai parfois du mal à m’expliquer. Je suis ébahi par leur force".
Denis Mukwege est le coauteur de Panzi, aux Editions du Moment