L'INFO. La justice tient-elle une vraie preuve de la culpabilité du "Cavaliere" ? Il semble que cela soit le cas au vu de la procédure choisie. Le parquet de Naples a demandé lundi le renvoi en justice immédiat de Silvio Berlusconi, soupçonnant l'ex-chef du gouvernement italien de corruption pour avoir "acheté", il y a plusieurs années, un sénateur de l'opposition.
Quelle procédure ? Le "Cavaliere" a été accusé à plusieurs reprises par ses adversaires politiques d'avoir acheté des voix ou des élus, mais c'est la première fois qu'il se retrouve officiellement accusé pour un cas concret de corruption d'un homme politique. En droit italien, la procédure accélérée de jugement immédiat peut être demandée par le ministère public quand la preuve du délit est considérée comme "évidente".
La procédure de "jugement immédiat" prévoit que le dossier passe entre les mains du juge des audiences préliminaires qui décide dans un laps de temps assez bref, une dizaine de jours maximum, s'il l'accepte ou non. S'il l'accepte, toute la phase des audiences préliminaires qui doit en principe décider du renvoi en justice ou non d'un inculpé et qui peut durer plus d'un an, est évitée et l'on passe directement au procès. En cas de refus, le parquet peut toujours opter pour la procédure ordinaire.
Quelle affaire ? L'affaire remonte aux élections législatives de 2006. Elles ont été remportées de justesse par la coalition hétéroclite de gauche dirigée par Romano Prodi. A l'époque, il n'avait obtenu qu'une poignée de voix de plus au Sénat que son concurrent, Silvio Berlusconi.
Quelques mois après, Sergio De Gregorio, l'un des sénateurs élu dans l'un des partis de la coalition de Romano Prodi retourne sa veste… et rejoint Silvio Berlusconi. Par ce geste, ce sénateur a rendu plus fragile la majorité qui soutenait la gauche et a accéléré la chute du gouvernement qui a dû jeter l'éponge en 2008.
Quel a été le rôle du "Cavaliere" ? Selon le parquet, Silvio Berlusconi aurait versé trois millions d'euros, dont deux en espèces, à Sergio De Gregorio pour le débaucher. Ce dernier l'a reconnu devant des magistrats et s'est même épanché dans la presse. "Naturellement que j'ai pris de l'argent de Berlusconi, je l'ai d'ailleurs déjà dit aux magistrats", a-t-il lancé dans une récente interview.
"J'ai mûri la décision de clarifier, de raconter, d'assumer mes responsabilités, y compris pénales, après avoir rêvé de mon père qui m'incitait à me libérer de mes fardeaux, à devenir un homme libre pour pouvoir recommencer", a expliqué Sergio De Gregorio pour justifier son choix de tout déballer devant les magistrats.
Qu'en dit Prodi ? Ces révélations ont mis le feu aux poudres. Romano Prodi a pour sa part estimé que cela représentait "un épisode très triste, et si c'est vrai, un attentat contre la démocratie". L'ex-chef du gouvernement italien de gauche a été entendu comme témoin dans cette affaire par le parquet de Naples.
Qu'en dit le parti de Berlusconi ? Les dirigeants du Peuple de la liberté (PDL), le parti de Silvio Berlusconi, ont pour leur part rappelé que ce ne fut pas Sergio de Gregorio qui a fait chuter le gouvernement de Romano Prodi mais le ministre de la Justice de ce dernier, Clemente Mastella, en quittant début 2008 la coalition de gauche alors au pouvoir.
D'autres affaires judiciaires en cours... Trois verdicts concernant Silvio Berlusconi sont attendus ce mois-ci. Outre son procès en appel pour sa condamnation pour fraude fiscale dans l'affaire Mediaset, le tribunal de Milan a décidé vendredi dernier le report du réquisitoire du parquet dans le procès Rubygate, dans lequel il est accusé de prostitution de mineure et abus de pouvoir. La veille, il a été condamné à un an de prison en première instance dans le procès sur le rachat d'une banque dans lequel il était accusé d'avoir violé le secret de l'instruction. Un jugement dans lequel il fera très probablement appel.