Un an après l'interdiction des minarets, les électeurs suisses ont validé dimanche à 52,9 % des voix l'initiative de l'Union démocratique du centre (UDC), la plus à droite de l'échiquier politique helvétique, prévoyant l'expulsion automatique de criminels étrangers. Que prévoit exactement le texte ? Y-a t-il des exemples similaires en Europe ? Europe1.fr fait le point.
Qui est concerné ? Déposé en 2009 par l'Union démocratique du centre (UDC), adopté dimanche par référendum, le texte prévoit d’expulser systématiquement les étrangers de Suisse s'ils ont été condamnés pour meurtre, viol, délit sexuel, brigandage, traite d'êtres humains, trafic de drogue, ou fraude aux aides sociales. Avec une interdiction d’entrer sur le territoire de 5 à 15 ans, allant jusqu’à 20 ans en cas de récidive. Cette expulsion interviendrait après que le condamné ait effectué sa peine d’emprisonnement ou réglé son amende.
Qu’est ce qui est nouveau ? Le juge helvétique avait déjà la possibilité de prononcer une interdiction temporaire ou définitive du territoire à l’égard d’un étranger reconnu coupable de crimes graves, mais seulement au cas par cas. En moyenne, environ 400 délinquants étrangers sont expulsés chaque année. Avec le référendum de dimanche, cette expulsion devient automatique pour une liste d’infractions. L'initiative de l'UDC devrait multiplier le chiffre des expulsions par quatre ou cinq.
Comment la question est perçue en Suisse ? Comme à son habitude, la formation populiste et nationaliste UDC n’a pas hésité à faire campagne sur des affiches polémique. L’une d’elle a particulièrement retenu l’attention des médias. Elle montre un homme musclé, à la mine patibulaire, avec pour slogan "Ivan S., violeur et bientôt suisse ?". "Des messages simplistes mais terriblement efficaces" estime le quotidien Le Matin, au lendemain du vote. En face, commente 24 Heures, les autres partis ont fait preuve "d'amateurisme". Le gouvernement suisse avait présenté une contre-proposition, destinée à lier le renvoi des immigrés à la sévérité de la peine prononcée plutôt qu'à une liste arbitraire de crimes.
Un rappel à l’ordre de Bruxelles ? Les opposants à l'expulsion automatique font valoir que ce durcissement de la loi est contraire aux traités internationaux contre la discrimination et au principe de libre circulation des personnes en Europe. Concrètement, l'expulsion systématique de n’importe quel citoyen de l’UE pourrait remettre en cause les accords bilatéraux en vigueur entre la Confédération et l'Union européenne, notamment sur la libre circulation.
Et ailleurs en Europe ? Aucun autre pays ne prévoit une expulsion automatique des étrangers criminels. En France, le juge pénal peut prononcer une interdiction du territoire français, à titre définitif ou temporaire, en plus de la peine prononcée. Après le discours de Nicolas Sarkozy à Grenoble, l’été dernier, une réforme est envisagée pour étendre la possibilité de déchéance de la nationalité aux Français naturalisés depuis moins de 10 ans, condamnés pour meurtre d'agents dépositaires de l'autorité publique. En Grèce, en Allemagne ou encore au Danemark, la loi autorise l’expulsion d'étrangers (y compris les ressortissants communautaires) mais au cas par cas.