L'audition aura duré presque huit heures. Nafissatou Diallo, la femme de chambre de l'hôtel Sofitel de Manhattan qui accuse Dominique Strauss-Kahn de crimes sexuels, a été entendue mercredi au bureau du procureur de New York, au lendemain des interviews qu'elle a données à des médias américains.
"Le droit de poursuivre au civil"
A la sortie de l’audience où il a assisté Naffissatou Diallo , mercredi, son avocat Kenneth Thomson a réaffirmé que sa cliente "est une femme innocente". "Diallo a été attaquée sexuellement et presque violée par l’un des hommes les plus puissants de la planète (…) Une femme qui a presque été violée a le droit de faire l’action en justice qu’elle veut", a martelé Kenneth Thomson (...) Elle a le droit d'engager sa propre action en justice" au civil, en plus de l'action en justice au pénal lancée par le ministère public".
Son avocat est aussi revenu sur les propos qui ont été attribués à sa cliente lors d’une conversation téléphonique avec un ancien dealer, incarcéré dans une prison de l’Arizona. "Elle n’a jamais dit les mots : il a beaucoup d’argent, je sais ce que j’ai à faire", a affirmé Kenneth Thomson. "Toute cette conversation tournait autour de ce que Dominique Strauss-Kahn lui avait fait, il n’était pas question d’argent", a ajouté l’avocat de Naffissatou Diallo.
"Certaines choses ont été mélangées dans cette citation qui a été donnée au New York Times. Nous avons écouté cet enregistrement et il montre que la victime n'a jamais prononcé ces mots", a commenté Kenneth Thompson. Peu après le début de l'affaire, le journal new-yorkais affirmait que les enquêteurs ont mis plusieurs semaines avant de réussir à traduire cette échange téléphonique en peule, l'ethnie d'origine de Nafissatou Diallo. D'autres médias avaient d'ailleurs indiqué que la traduction de ces propos, difficile, n'était pas limpide et soulevait des questions.
Après être restée silencieuse et dans l'anonymat depuis la mi-mai, la jeune femme s'est montrée au grand jour dimanche et a donné des interviews, notamment à la chaîne de télévision ABC, où elle raconte les agressions dont elle assure avoir été victime. Nafissatou Diallo entre dans des détails très crus, racontant comment elle a été forcée à pratiquer une fellation à l'ancien ministre français.
Déclaration publique jeudi
La femme de chambre du Sofitel fera une déclaration publique jeudi à 18 heures (heure française) New York. Son intervention est prévue dans le cadre d'une conférence de presse qui réunira United African Congress, une organisation communautaire africaine, et son avocat Me Kenneth Thompson.
Nafissatou Diallo "remerciera personnellement le large rassemblement de New Yorkais qui l'ont soutenue, elle et sa fille, lors de cette terrible épreuve", précise United African Congress. Cependant, l'accusatrice ne répondra à aucune question de journalistes.
Prochaine audience le 23 août
La date de la prochaine audience au tribunal de New York, déjà repoussée du 18 juillet au 1er août, a été de nouveau reportée au 23 août. La décision a été annoncée mardi, au lendemain du témoignage choc de Nafissatou Diallo. "Nous avons donné notre accord pour repousser l'audience devant le juge (Michael) Obus du 1er août au 23 août", ont écrit mardi dans un communiqué les avocats de Dominique Strauss-Kahn, William Taylor et Benjamin Brafman. "Nous croyons savoir que le procureur continue d'enquêter. Nous espérons qu'il aura pris, d'ici le 23 août, la décision d'abandonner" les poursuites, ajoutent-ils.
L'audience qui a été reportée devait porter sur des questions importantes, et notamment permettre de fixer une date de début de procès, à moins qu'elle ne serve à annoncer l'abandon des sept chefs d'inculpation qui pèsent contre DSK, comme l'espèrent les avocats du Français.