L’opération militaire menée par l’Otan en Libye a franchi un palier. La France a envoyé des hélicoptères d’attaque pour soutenir les insurgés dans leur combat contre les forces du colonel Mouammar Kadhafi.
Rattachés à l'aviation légère de l'armée de terre française, une vingtaine d’hélicoptères ont été embarqués à bord du bâtiment de projection et de commandement "Le Tonnerre ", qui a quitté la base navale de Toulon dans la nuit du 17 au 18 mai dernier, selon les informations révélées par le blog spécialisé Le Mamouth et confirmées par Europe 1. Des hélicoptères auxquels s'ajoutent quelque 450 hommes.
"Pas de changement de stratégie", pour Juppé
Alain Juppé a confirmé l'information lundi, depuis Bruxelles. Pour le ministre des Affaires étrangères, il n'y a cependant "pas de changement de stratégie" : "nous sommes toujours à la stricte application des résolutions du Conseil de sécurité, qui prévoient de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour protéger les populations", a-t-il assuré, au micro d'Europe 1. L'envoi d'hélicoptères permet simplement de réaliser "des frappes plus ciblées", plus proches du terrain", a-t-il précisé. "Un avion ça vole très haut, un hélicoptère ça vole plus bas", a succinctement expliqué Alain Juppé.
Deux mois après le début de l'opération aérienne de la coalition internationale sous commandement de l'Otan en Libye, le 19 mars, l'intervention des hélicoptères de combat permettrait de viser certaines cibles des forces de Mouammar Kadhafi que les avions de chasse ne parviennent plus à détruire, en raison des risques de dégâts collatéraux.
Si le ministre a répété que l'engagement de troupes françaises au sol était exclu, l’envoi d’une force héliportée peut laisser présager un engagement plus poussé des forces françaises. L’escadrille embarquée sur le Tonnerre comprend en effet une douzaine de Gazelle anti-char, mais aussi des Tigres, des hélicoptères de plus grande taille embarquant une très importante puissance de feu. Le dispositif inclut également des appareils de recherche et de sauvetage, au cas où un hélicoptère serait abattu.
Le feu vert de l’opération a été donné par l’Elysée, qui amorce ainsi un virage dans la stratégie adoptée par l’Otan sur le front libyen. La France doit en informer avant la fin de la semaine le groupe de contact, qui rassemble tous les pays engagés dans la coalition. La France espère ainsi inciter ses partenaires à s’engager plus massivement.
Une tentative d'intimidation
La présence au large de la Libye d'une force expéditionnaire robuste, prête à débarquer, est clairement une tentative d'intimidation à l'égard des troupes loyales à Mouammar Kadhafi. Cela pourrait avoir deux conséquences : les soldats pro-Kadhafi pourraient être plus nombreux à déserter, ou, hypothèse moins optimiste, quelque 450 militaires français, tout près des exactions perpétrées par les soldats libyens, pourraient se voir obligés d'intervenir au sol. Et ce au nom du devoir impérieux de protéger les civils.
L'Otan est lancée depuis le 31 mars dans une intervention militaire en Libye sous mandat de l'ONU, avec pour mission d’empêcher le régime Kadhafi de s’en prendre à la population libyenne. Mais le conflit entre insurgés et forces pro-Kadhafi s’enlise malgré les frappes de l’Otan. pourtant, Alain Juppé a insisté "sur la volonté de la France" "de ne pas nous éterniser en Libye".
La France est donc tentée d’accélérer les opérations, d’autant que le coût de son engagement s’élève déjà à 54 millions d’euros depuis le début de son intervention, soit 1,2 million d’euros par jour. De plus, si l’opération dépasse les six mois, le gouvernement devra s’expliquer devant l’Assemblée nationale et lui rendre des comptes.