Le Parlement égyptien a été officiellement dissous samedi, par le Conseil suprême des forces armées (CSFA) au pouvoir. "L'application de l'arrêt ordonnant la dissolution de l'Assemblée du peuple a commencé et les ex-députés ne peuvent désormais y accéder que sur autorisation et notification préalable", a expliqué l'agence officielle Mena.
Dans un arrêt rendu jeudi, la Haute cour constitutionnelle avait invalidé les élections législatives de janvier, en raison d'un vice juridique dans la loi électorale ayant régi le scrutin. Ces élections s'étaient soldées par un raz-de-marée islamiste, avec près de la moitié des sièges revenant aux Frères musulmans, et près d'un quart aux fondamentalistes salafistes.
Les Frères réclament un référendum
Les détracteurs de l'armée l'accusent d'avoir orchestré cette décision de justice pour s'adjuger le pouvoir législatif, et un haut dirigeant des Frères musulmans, Mohammed Beltagui, dénonce un véritable "coup d'Etat".
Le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), issu des Frères, a vivement contesté samedi la dissolution du Parlement et réclamé un référendum "libre et transparent" sur cette question.
"Les menaces constantes de dissoudre le Parlement élu par 30 millions d'Egyptiens et d'Egyptiennes confirment la volonté du Conseil militaire de s'emparer de tous les pouvoirs", a réagi le PLJ dans un communiqué. "La volonté du peuple ne peut être annulée que par la volonté du peuple", a ajouté le parti islamiste.
Le vote du second tour de la présidentielle en cours
Cette décision d'invalider les résultats des élections provoque une crise politique, alors même que le second tour de la présidentielle a commencé samedi et se poursuit jusqu'à dimanche. Le Frère musulman Mohammed Morsi y affronte le dernier Premier ministre de Hosni Moubarak, Ahmad Chafiq, considéré comme le candidat de l'armée, qui le nie.
Malgré les tensions récentes entre la rue et l'armée au pouvoir, Ahmad Chafiq part pour le moment favori, selon les analystes. "Il a toutes les chances de l'emporter car les Egyptiens ne supportent pas la misère économique, la fuite des investisseurs... Il y a un grand désir de stabilité, affirme Antoine Basbous, directeur de l’Observatoire des pays arabes,contacté par FranceTV. Et les Frères musulmans ont fait preuve de boulimie, en présentant des candidats aux législatives partout, sans respecter la part de candidats indépendantistes".
Ce qui ne signifie pas non plus qu'Ahmad Chafiq fait l'unanimité, comme le rapporte Le Monde.fr. "En ce premier jour de vote pour le second tour, Mohammed Samir, habitant dans la ville nouvelle de Tagammu Khamis, est arrivé à huit heures du matin spécialement pour jeter sa chaussure à la tête d'Ahmed Shafiq, comme une dizaine d'islamistes et de révolutionnaires", raconte Claire Talon, grande reporter sur place pour le quotidien.
Dans ce contexte, 50 millions d'électeurs sont attendus aux urnes. Avant même l'ouverture des bureaux de vote samedi, de longues queues attendaient sous un soleil de plomb, pour exercer leur droit démocratique.