Un chef de la diplomatie française en Birmanie, la visite était inédite depuis l'indépendance du pays en 1948. Arrivé samedi sur le sol birman, Alain Juppé a rencontré l'opposante Aung San Suu Kyi. Le ministre a, par ailleurs, encouragé le nouveau régime dans la voie des réformes.
"Comme le reste de la communauté internationale, nous avons observé avec beaucoup d'attention les signes positifs du président Thein Sein, y compris récemment", a déclaré Alain Juppé. "Nous répondrons, la France et l'UE, positivement et en termes concrets, à ces gestes significatifs", a-t-il ajouté, sans préciser si cela pourrait concerner les sanctions. L'UE, qui a annoncé début janvier l'ouverture prochaine d'une représentation en Birmanie, avait légèrement allégé en avril dernier ses sanctions contre Naypyidaw.
L'opposante Aung San Suu Kyi a, elle aussi, de nouveau salué dimanche les récentes réformes dans son pays... mais cette fois en français. "Nous espérons que ces nouveaux développements renforceront le processus de démocratisation et la réconciliation nationale", a-t-elle déclaré après sa rencontre d'une petite heure avec le ministre français. "Une de nos préoccupations principales est d'arriver à la fin des conflits ethniques" alors que de nombreuses minorités n'ont jamais pacifié leurs relations avec le pouvoir central depuis l'indépendance en 1948, a-t-elle insisté.
La légion d'honneur remise à Aung San Suu Kyi
Alain Juppé a remis à l'opposante les insignes de commandeur de la légion d'honneur. Une distinction qu'elle a acceptée "non uniquement en mon nom mais aussi en celui de tous les peuples de Birmanie qui ont souffert pour leur honneur et l'honneur de notre patrie car nous ne faisons qu'un".
La "Dame" n'a d'autre part pas exclu d'accepter un poste au gouvernement si elle était élue, pour la première fois, lors des législatives partielles d'avril. "Cela dépend des circonstances et cela dépend de quel poste de ministre", a-t-elle déclaré.
Le ministre français, qui doit rencontrer le président Thein Sein lundi, a d'ailleurs plaidé pour que ces élections soient "libres et justes", un an et demi après le scrutin de novembre 2010, dénoncé par l'Occident comme une mascarade.
300 prisonniers politiques libérés
La junte au pouvoir pendant près d'un demi-siècle s'est auto-dissoute et a transféré en mars dernier ses pouvoirs à un nouveau gouvernement "civil", bien que contrôlé par d'anciens militaires. Cette nouvelle équipe a multiplié les réformes spectaculaires ces derniers mois, permettant en particulier le retour au coeur du jeu politique de Suu Kyi. Dernier geste en date, la libération de quelque 300 prisonniers politiques, dont des dissidents de premier plan.
Cette mesure a été saluée par l'Occident qui la réclamait sans relâche comme une preuve de la sincérité des réformes. Les Etats-Unis, fidèles à leur politique de "donnant-donnant", se sont même dits prêts à échanger des ambassadeurs avec Naypyidaw.