L’INFO. L’Espagne se prépare à célébrer ce week-end sa fête nationale. Mais l’ambiance de l’autre côté des Pyrénées est loin d’être festive : la crise économique, les mesures d’austérité dans la santé ou l’Education, les scandales de corruption qui touchent les partis politiques… De ce ras-le-bol général est né le "15M", le mouvement des Indignés, qui étaient descendus en 2011 par milliers dans la rue. Désormais, cette contestation a une expression politique, le Parti X lancé cette semaine. L’objectif ? Venir à bout d’une "une classe politique corrompue et incapable" de sortir le pays de la crise, mais également remettre le citoyen au centre du jeu.
Qui sont-ils ? Un groupe de pression. Ce parti, dont l’idée a été lancée lors de l’occupation prolongée de la Puerta del Sol à Madrid, est extrêmement hétérogène. Selon des estimations fournies par El Pais, il y aurait près de 6.000 sympathisants dont 160 qui ont un rôle très actif. Ce sont surtout des citoyens lambda : des profs, des petits patrons, des étudiants, des retraités, des scientifiques et des chômeurs. Comme pour les "Indignés", ce parti fonctionne avec des personnes qui "travaillent" sur des tâches précises et ne dispose actuellement d'aucun organe dirigeant. La prochaine étape sera donc d’établir une liste de candidats pour les prochaines échéances électorales qui sera soumise à l’approbation du réseau citoyen.
Quel programme ? Un plan Marshall et un Nuremberg financier. Le Parti X souhaite un plan d'urgence de sortie de crise grâce à une "réponse citoyenne". "Nous voulons que les coupables de la crise soient jugés et un plan d'action pour les citoyens : un Nuremberg financier et un plan Marshall adapté au 21è siècle", affirme le parti sur son site internet. Car la lutte contre la corruption et la fraude est l'un des piliers importants du programme. Un argument de poids, quand on sait que dans les sondages, les Espagnols placent la corruption en deuxième position de leurs préoccupations derrière le chômage. "Comme de par hasard, la somme qui manque pour sortir de la crise est égale à celle qui n'a pas été payée" au fisc, affirme le mouvement qui dénonce avec force l'évasion fiscale. "La seule réduction de la fraude fiscale des grandes entreprises rapporterait à l'Etat 30 milliards d'euros", ajoute le Parti X.
> EN VIDEO : son programme (en espagnol) :
Pour relancer l'économie, le Parti X propose, comme le gouvernement, d'aider les petites et moyennes entreprises, soit 99,88% des entreprises espagnoles, en relançant le crédit. Mais il plaide également pour une baisse de la pression fiscale, une réduction des monopoles (dans l'énergie notamment) ainsi que d’une redirection des aides aux grandes entreprises vers les PME. Côté emploi, le Parti X veut instaurer un "salaire maximum inter-entreprises" qui ne peut être plus de dix fois supérieur au plus bas salaire, avec pour tous un système de primes liées à la productivité.
Quels moyens ? Pour diffuser leurs idées, les sympathisants utilisent principalement les réseaux sociaux : leur compte Facebook et Twitter a désormais près de 25.000 abonnés. "Nous nous sommes réunis à domicile, dans les cafés, et surtout nous travaillons via Internet", affirme un membre du Parti X lors d'une conférence de presse. Lors des récents événements qu’il a organisés en Espagne, le parti s’est principalement financé en faisant appel à du crownfunding, le financement participatif sur Internet. Chacun est donc libre de donner ce qu’il veut et surtout ce qu’il peut.
Les comités locaux :
Falciani participe au projet. Au sein de ce parti, figure le Français Hervé Falciani, ex-informaticien de la banque HSBC Genève, qui a divulgué en 2008 des fichiers bancaires permettant de découvrir des milliers d'évadés fiscaux dans le monde, et menant au redressement fiscal de fraudeurs français. L'homme participe justement à une commission de lutte contre la corruption au sein du Parti X. Il y a aussi un célèbre inspecteur des impôts connu pour sa lutte contre le blanchiment d'argent, mais également un avocat retraité qui a passé sa vie à aider les citoyens victimes de facturations abusives de la compagnie d’électricité, rapporte TV5 Monde.
Pour beaucoup d’observateurs, ce parti a des faux airs du Mouvement Cinq étoiles de Beppe Grillo en Italie."Nous sommes en contact avec eux, mais ce n'est pas un modèle. Nous refusons toute incarnation du parti dans un chef de file médiatique, et nous considérons les critères de présentation de leurs candidats comme trop laxistes", détaille Simone Levi, l’une des participantes. Reste à savoir quel avenir ce parti pourrait avoir sur l’échiquier espagnol. Selon Jaime Mique, analyste électoral interrogé par Le Monde, une candidature citoyenne telle que celle-ci "peut espérer obtenir 1,2 million de votes aux prochaines élections européennes et 3,5 millions aux prochaines élections générales". Des chiffres pour l'instant virtuels mais qui pourraient les placer juste derrière le Parti socialiste et le Parti populaire (droite).