C'était l'un des enjeux du scrutin des européennes. La montée des eurosceptiques a bien été confirmée après les résultats des élections dimanche soir. "Choc", "séisme", les responsables politiques multiplient les termes inquiétants pour qualifier cette poussée des europhobes. Dans les faits, à quoi correspond cette percée et celle-ci va-t-elle réellement changer la donne au Parlement européen ? Europe 1 fait le point.
Dans quels pays les eurosceptiques ont-ils percé ?
C'est en France et en Grande-Bretagne que les eurosceptiques ont fait leurs meilleurs scores, avec respectivement 26% et environ entre 27 et 32% des voix. Marine Le Pen et Nigel Farage gagnent leur pari de devenir les premiers partis de leur pays lors de ces élections européennes.
En Allemagne également, le tout nouveau "Alternative für Deutschland", né il y a à peine an, fait 7% des voix. Côté autrichien , le FPÖ (Parti de la liberté), auparavant dirigé par Jörg Haider, fait aussi une belle poussée en troisième place avec 20,5% des suffrages.
Si en Hongrie, les extrémistes du Jobbik se tassent, ils arrivent tout de même deuxième, à 14,7%. En Finlande également, les Vrais finlandais deviennent la troisième formation politique avec 12,90 % des voix.
Combien de sièges vont-ils gagner dans l'hémicycle?
Les premières projections du Parlement européen sont trompeuses. Par rapport à 2009, elles ne donnent que 7 eurodéputés de plus aux "non-inscrits", auxquels appartiennent le Front national, le Jobbik et le FPÖ. Pourtant, les eurosceptiques pourraient être plus d'une centaine à siéger à Strasbourg en 2014, contre 64 en 2009. Alors d'où vient cette différence ?
En fait, les nouveaux députés eurosceptiques sont pour l'instant comptabilisés dans "Autres" dans les projections de l'Union européenne. Tant qu'ils ne choisissent pas de s'inscrire, ou non, dans un groupe politique, le Parlement européen ne peut pas officiellement dire qu'ils sont "non-inscrits".
Donc, si on ajoute ces "autres" aux non-inscrits et au groupe Europe liberté démocratie de Nigel Farage uni notamment avec les Finlandais, ils pourraient bien être plus d'une centaine d'eurosceptiques à Strasbourg.
Vont-ils pouvoir former un groupe européen ?
C'est la grande inconnue de ce scrutin. Marine Le Pen s'est déjà dite prête à présider un groupe politique européen, qui doit compter au minimum 25 députés de 7 pays différents. Mais la partie n'est pas jouée d'avance.
Le parti néerlandais de Geert Wilders, plus gros allié de Marine Le Pen, a subi une cruelle déconvenue lors des élections européennes. Et le Britannique Nigel Farage, qui préside lui-même un groupe d'une trentaine de députés dont les Finlandais, refuse pour l'instant de s'allier avec la Française.
La patronne du FN ira-t-elle jusqu'à chercher l'élu néo-nazi allemand et ses homologues grecs également élus dimanche pour former un groupe ? Rien n'est moins sûr.
Auront-ils du poids dans les couloirs de l'Union européenne ?
Tout dépend de la création d'un groupe au Parlement européen. Jusqu'à présent, en siégeant parmi les non-inscrits, une partie des eurosceptiques européens ne pouvaient pas déposer de motions de résolution ou des amendements. Ce qui limitait considérablement leur marge de manœuvre.
Mais quand bien même Marine Le Pen arriverait à fédérer autour d'elle, les eurosceptiques sont loin d'avoir une large majorité au Parlement européen. Ils occuperont environ 15% des sièges. Ils devront combattre les puissants Parti populaire européen, auquel adhèrent l'UMP et le Modem/UDI, et les Socialistes et démocrates, parmi lesquels siègent les députés PS.
Or, les oppositions gauche-droite sont moins fréquentes au Parlement européen qu'à l'Assemblée nationale. Le consensus est de mise à Strasbourg et Bruxelles. A part quelques rares textes votés à une courte majorité, les eurosceptiques ne devraient pas beaucoup faire évoluer la ligne politique du Parlement européen.
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