Dix mois après, le traumatisme n’a pas disparu à Fukushima. Dans cette région du nord-est du Japon, balayée le 11 mars par l’un des dix séismes les plus puissants de l’histoire, suivi d’un raz de marée et d’une catastrophe nucléaire, 20.000 personnes sont mortes ou ont disparu. Aujourd’hui, les autorités affirment que la centrale est "stabilisée" et préparent le retour d’une partie des habitants évacués. Mais au Japon, la crainte de la radioactivité est loin d’avoir disparu.
Philippe Nibelle, seul Français de Fukushima, a vécu le séisme calfeutré dans sa maison, située à 80 kilomètres de la centrale. Marié à une Japonaise, il a fait le choix de rester mais doit maintenant composer avec des contraintes quotidiennes, dont celle de la nourriture. Il évite "tout ce qui est viande ou poisson en provenance du Japon, de n’importe quelle région du Japon". " Il faut connaître la provenance des aliments, et, si on n'est pas sûr, éventuellement les faire analyser ", a-t-il décrit à Europe 1.
Philippe Nibelle raconte son quotidien :
Un appareil à 30.000 euros
Or, pour analyser un seul aliment, il faut compter "minimum 20 minutes". "Il faut du temps, de l'argent, des gens, mais c'est notre survie" qui est en jeu. Dans sa ville de Haïzou Wakamatsu, il n’existe qu’un seul testeur d’iode et de césium, un équipement qui coûte 30.000 euros.
Il en faudrait pourtant un second, car si le gouvernement japonais commence déjà à préparer un retour progressif de la population dans une partie du périmètre interdit, la centrale n’a pas fini de souiller les environs. D’après Mycle Schneider, expert indépendant, les quatre réacteurs de Fukushima créent des "boues très radioactives", qui sont stockées "dans des décharges à même le sol". "On est en train de créer les problèmes de demain", a-t-il déploré au micro d’Europe 1.
Mais pour lui, la catastrophe aura eu au moins un mérite : avant le 11 mars, le Japon fonctionnait avec 54 réacteurs nucléaires sur son territoire. Seuls 8 sont encore en activité aujourd’hui, car les autres ont été arrêtés sous la pression de la population.