En quelques jours, les relations franco-turques se sont vraisemblablement refroidies durablement. Alors que les parlementaires français ont adopté jeudi une loi sanctionnant pénalement la négation du génocide arménien de 1915-1917, la réponse de la Turquie ne s'est pas fait attendre. Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a ainsi accusé vendredi le président français Nicolas Sarkozy de jouer sur "la haine du musulman et du Turc" et la France d'avoir commis un génocide en Algérie.
"Le président français Sarkozy a commencé à rechercher des gains électoraux en utilisant la haine du musulman et du Turc", a déclaré Erdogan lors d'une conférence à Istanbul. "Ce vote qui a eu lieu en France, une France où vivent environ cinq millions de musulmans, a clairement montré à quel point le racisme, la discrimination et l'islamophobie ont atteint des dimensions dangereuses en France et en Europe", a asséné le Premier ministre.
"15% de la population algérienne massacrée"
Erdogan a en suite appelé la France à balayer devant sa porte et à assumer son propre passé. "On estime que 15% de la population algérienne a été massacrée par les Français à partir de 1945. Il s'agit d'un génocide", a-t-il estimé, faisant référence aux violences commises lors du processus d'indépendance de l'Algérie de la domination française, entre 1945 et 1962.
"Si le président français Nicolas Sarkozy ne sait pas qu'il y a eu un génocide, il peut demander à son père Pal Sarkozy (...) qui a été légionnaire en Algérie dans les années 1940", a-t-il ajouté. "Je suis sûr qu'il (Pal Sarkozy) a beaucoup de choses à dire à son fils sur les massacres commis par les Français en Algérie."
Sarkozy veut calmer le jeu
Nicolas Sarkozy a par la suite tenté de calmer le jeu. "Je respecte les convictions de nos amis turcs, c'est un grand pays, une grande civilisation, ils doivent respecter les nôtres", a demandé le président devant la presse française à Prague, en marge de sa visite en République tchèque pour assister aux obsèques de l'ancien président tchèque Vaclav Havel.
"La France ne donne de leçons à personne, mais la France n'entend pas en recevoir", a également ajouté le président français.
Axel Poniatovski, président UMP de la commission des Affaires étrangères à l'Assemblée nationale, a lui aussi joué vendredi l'apaisement. "Ce sont des propos qui sont tout de même assez violents et déplacés, probablement prononcés sous le coup de l'émotion, de l'énervement", a-t-il tempéré à l'antenne d'Europe 1. "Il ne faut pas y prêter plus d'importance que cela n'en a", a ajouté le parlementaire français.