Leur offensive fulgurante semblait avoir paralysé les forces de sécurité. Face aux djihadistes de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), qui ont pris le contrôle d’une partie du pays en quelques jours, les autorités irakiennes ont fini par répliquer et assurent, depuis dimanche soir, avoir "repris l’initiative" sur le terrain. Sur le plan diplomatique, Washington et Téhéran, tous deux alliés de Bagdad, pourraient entamer des négociations sur l’aide à apporter au régime irakien.
L'Irak se mobilise. Samedi, l’armée irakienne a repris deux villes près de Bagdad, la capitale, dont l’EIIL espère toujours s’emparer. Le lendemain, les forces de sécurité ont aussi réussi à repousser un assaut d’insurgés sur Tal Afar, une ville stratégique à 380 km au nord de Bagdad et à une soixantaine de kilomètres de la frontière syrienne. Nouri Al-Maliki, le Premier ministre irakien, a annoncé que 279 "terroristes" avaient été tués en 24 heures, un bilan impossible à vérifier.
Dans la population aussi, la mobilisation s’organise. Le gouvernement, ainsi que le grand ayatollah Ali Al-Sistani, la plus haute autorité religieuse chiite d’Irak, ont appelé les Irakiens à prendre les armes contre les djihadistes. Un appel entendu par des milliers de civils, pris en charge par l’armée pour un entraînement sommaire. Mais aussi par les djihadistes : au nord de Baqouba, un centre de recrutement a été visé par des tirs d’obus de mortier, qui ont fait six morts.
Une aide venue de l'extérieur ? Les alliés de l’Irak, à commencer par les Etats-Unis, préparent eux aussi la riposte. Des renforts ont été envoyés autour de l’ambassade américaine à Bagdad et certains employés ont été déplacés vers d’autres sites. Samedi, Washington a annoncé le déploiement du porte-avions USS George H.W. Bush dans le Golfe persique.
Au sein de la classe politique américaine, des voix s’élèvent, comme celle du sénateur républicain Lindsay Graham, pour réclamer des frappes aériennes en Irak. Le président Barack Obama est quant à lui resté prudent, assurant qu’il était hors de question de renvoyer "des troupes américaines au combat en Irak", tout en indiquant étudier "un éventail d’options pour soutenir les forces de sécurité irakiennes".
L’une de ces options pourrait bien inclure des discussions avec l’Iran. L’Iran et les Etats-Unis, en froid depuis 34 ans mais tous deux alliés de Bagdad, sont en effet concernés directement par l’avancée des djihadistes en Irak. L’Iran, qui se dit hostile à "toute intervention militaire étrangère en Irak", a toutefois entrouvert la porte à une coopération avec les Etats-Unis. D’après le Wall Street Journal, des discussions entre Washington et Téhéran sur le sujet pourraient bien avoir lieu à l’occasion de la reprise des pourparlers sur le nucléaire iranien. Mais un responsable américain a douché ces espoirs, assurant : "nous n’avons pas engagé [de dialogue] et n’avons rien à présenter".
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