L’issue du scrutin qui s’achève mardi en Egypte laisse peu de place au doute : l’ancien chef de l’armée, Abdel Fatah al-Sissi, devrait être élu sans surprise à la présidence du pays. L’homme fort de l’Egypte, qui tient déjà les rênes du pays, n’a même pas eu besoin de faire campagne, tant sa popularité est grande. Car un quasi-culte de la personnalité s’est développé autour du maréchal à la retraite, dont le portrait est placardé depuis des mois dans les rues du Caire. Une vraie "Sissi-mania".
Il est partout mais ne se montre pas en public. En guise de campagne électorale, al-Sissi s’est contenté d’interview fleuves à la télévision, au cours desquelles il a déclaré notamment que l’Egypte ne pouvait pas connaître la "vraie démocratie avant 20 ou 25 ans". Il n’est pas apparu en public une seule fois, pour des raisons de sécurité selon lui. Mais ce militaire de formation n’en a pas besoin, puisque son visage est déjà partout.
Chaque rue, et à l'intérieur, chaque échoppe, a son portrait d’al-Sissi. Tout un marketing s’est développé autour de la personnalité de l’ex-maréchal, avec des chocolats, un parfum et même… une nuisette à son effigie.
Vous en voulez encore hein, des chocolats Al Sissi? Oui mes potes m'ont soignée... #egyptepic.twitter.com/1H6NC9Zfy8— Claude Guibal (@ClaudeGuibal) October 8, 2013
Sissi a encore frappé, une marque de parfum a son effigie. #Egyptepic.twitter.com/0Ofhod8CnN— Mعhdi B. (@HidEm_) May 21, 2014
I can't even....why? Sissi the lion heart on what appears to be a female nighty. (Photo via @HebaFarooq ) pic.twitter.com/LfLFdzaJGM— Dalia Ezzat (@DaliaEzzat_) May 22, 2014
"Jésus vous appelle à voter pour al-Sissi". Pour un grand nombre d’Egyptiens, l’auteur du coup de force du 3 juillet 2013, qui a destitué le président islamiste Mohamed Morsi, est l’homme à poigne qui parviendra à ramener la stabilité.
Abdel Fatah al-Sissi fait aussi recette auprès des électeurs coptes, qui ont accueilli avec soulagement la destitution de Mohamed Morsi. Pour enfoncer le clou, des affiches ont été placardées, avec un slogan peu subtil mais qui a le mérite d’être clair : "pour éradiquer le terrorisme : Jésus vous appelle à voter pour al-Sissi"
RT "@mariaamtaher: "To eradicate terrorism:Jesus urges you to vote for Sissi". #AntiCoup#Egyptpic.twitter.com/eeghJxtCjY"— Anti-Coup Alliance (@EgyAntiCoup) May 26, 2014
Un rival peu menaçant. Face à al-Sissi, un seul rival : Hamdeen Sabbahi, leader de la gauche, qui ne risque pas de le mettre en danger. Malgré une campagne active sur le terrain, il ne semble pas en mesure d’empocher un nombre significatif de voix.
Quant à l’opposition islamiste pro-Morsi, elle a été réprimée implacablement depuis la destitution du président issu des Frères musulmans. Depuis juillet 2013, policiers et soldats ont tué plus de 1.400 manifestants et emprisonné plus de 15.000 personnes. Des centaines de partisans de Mohamed Morsi ont aussi été condamnés à mort, lors de procès de masse expéditifs. Une répression contre laquelle certains Egyptiens protestent, en graffiti.
Abdel Fatah al-Sissi est malgré tout bien parti pour devenir le sixième dirigeant égyptien issu de l’armée. Pour ses détracteurs, l’élection confirmera que l’armée a bien repris le pays en main, trois ans après la révolte contre Hosni Moubarak, lui aussi issu du sérail militaire.
Et le régime al-Sissi serait même encore plus dur que celui de l’ancien raïs. D’après des défenseurs des droits de l’Homme, le gouvernement intérimaire en place depuis près d’un an s’est en effet montré plus autoritaire que celui de Moubarak.
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