"Tantaoui dehors" telle est désormais la principale revendication des manifestants, au bout de cinq jours de violences qui ont fait officiellement 35 morts. Mercredi, ils étaient encore des milliers à réclamer le départ des militaires au pouvoir, malgré la promesse du chef de l'armée d'organiser une présidentielle mi-2012 pour un retour au pouvoir civil.
Eviter les affrontements "au sein d'un même peuple"
Dans une prise de position d'une fermeté inédite, le grand imam d'Al-Azhar, plus haute institution de l'islam sunnite, qui siège au Caire, a appelé la police à ne pas tirer sur les manifestants et l'armée à éviter les affrontements "au sein d'un même peuple".
Ces déclarations interviennent quelques heures après que des médecins ont pour la première fois fait état de décès par balles réelles au cours de violences qui ont fait 33 morts depuis samedi, selon les morgues egyptienne.
Le Parti de la liberté et de la justice, organe politique des Frères musulmans, a demandé au Conseil suprême des forces armées (CSFA) de "présenter ses excuses au peuple égyptien", alors qu'Amr Moussa, ancien chef de la Ligue arabe et candidat déclaré à la présidentielle, a exhorté le CFSA à faire cesser "immédiatement" les violences et à en juger les responsables.
Tantaoui acculé
"Tantaoui, c'est Moubarak copié/collé. C'est Moubarak en tenue militaire", assure un manifestant, Ahmed Mamdouh, un comptable de 35 ans.
Sous la pression des manifestants, le maréchal Hussein Tantaoui, chef d'Etat de fait, s'est engagé mardi soir à organiser une présidentielle avant fin juin 2012, se disant prêt à remettre le pouvoir immédiatement si un éventuel référendum en décidait ainsi. Mais les protestataires disent ne pas croire un mot des paroles du maréchal, ministre de la Défense sous le régime de Hosni Moubarak déchu le 11 février.
La place Tarhir toujours embrasée
Dans le centre du Caire, les affrontements violents se poursuivaient en début de soirée dans la rue Mohamed Mahmoud qui relie la place Tahrir au ministère de l'Intérieur. La police anti-émeute, derrière des barricades, tirait des grenailles et du gaz lacrymogène sur les manifestants, qui brandissaient d'imposants drapeaux égyptiens, tandis que des ambulances allaient et venaient pour transporter de nombreux blessés. Des affrontements ont également été notamment signalés dans les villes d'Alexandrie et Port-Saïd (nord), Suez, Qena (centre), Assiout et Assouan (sud), dans le delta du Nil et à Marsa Matrouh (ouest).
Condamnation internationale
Le haut commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Navi Pillay, a réclamé une enquête "rapide, impartiale et indépendante" sur les violences, tandis que les militants égyptiens accusent les policiers de viser les manifestants au visage, plusieurs d'entre eux ayant perdu l'usage d'un œil.
Les Etats-Unis ont condamné "l'usage excessif de la force" par la police et demandé au gouvernement de protéger le droit de manifester, tandis que trois Américains ont été arrêtés "en relation avec les manifestations", selon le département d'Etat. Berlin a également condamné ces violences, Londres dénonçant une "violence inacceptable" et "disproportionnée" contre les manifestants avec des "balles réelles et des gaz dangereux".
L'Organisation de la coopération islamique (OCI) a pour sa part appelé "à la retenue".