Le concours de l'Eurovision, dont la finale a lieu samedi à Bakou, est vu par le pouvoir en place en Azerbaïdjan comme une chance unique de faire connaître le pays, très critiqué sur la questions des droits de l'Homme, à travers une image résolument positive.
Dans la capitale, le très brillant Crystal Hall, mi-salle, mi-stade de 23.000 places, a été construit spécialement pour l'occasion face à la mer Caspienne. Et tout dans la ville rappelle la tenue du concours : son symbole, un drapeau azerbaïdjanais en forme de cœur, s'affiche dans le métro, sur les taxis et en haut des gratte-ciels.
Ces travaux ont pu être financés grâce à la manne pétrolière de ce pays du Caucase, 22e producteur mondial avec un million de barils par jour. Les pouvoirs locaux ont d'ailleurs offert à tous les journalistes couvrant l'Eurovision une petite boule de cristal contenant un peu de cet or noir, sans doute pour les inciter à ne parler d'eux qu'en bien.
Liberté d'expression réprimée
Car, dans le même temps, l'Eurovision est aussi l'occasion idéale pour l'opposition et les ONG de dénoncer les violations de droits de l'Homme de cette ancienne république soviétique dominée par la "dynastie" des Aliev – Ilham Aliev, président depuis 2003, avait succédé à son père Heydar, en poste depuis 1993.
Depuis quelques jours, de nombreuses manifestations sont ainsi organisées. L'opposition y accuse le pouvoir en place de réprimer la liberté d'expression et d'emprisonner des opposants sur de fausses accusations.
Craintes d'arrestations massives
Oktay Lygenderei, un militant de l'opposition, a ainsi observé une grève de la faim pendant trois jours pour soutenir son frère, condamné à trois ans de prison l'an dernier pour avoir protesté contre le régime. Quant à la liberté de la presse, elle est estimée dans une "situation très grave" par Reporters sans frontières, soit la pire classification possible, que seule la Biélorussie partage en Europe.
Plusieurs dizaines de manifestants ont été interpellés par la police jeudi à Bakou. Mais le pire est peut-être à venir : l'opposition et les ONG craignent des arrestations massives après le concours. "Les autorités vont se venger après le départ des journalistes étrangers", assure Max Tucker, d'Amnesty International.