L’INFO. La reprise des pourparlers, à Genève, s’annonce particulièrement difficile. Jeudi, les négociateurs des grandes puissances et de l’Iran commencent à discuter dans le détail d’un projet d’accord intérimaire sur le nucléaire. Chacun va donc tenter de concilier leurs positions respectives pour aboutir à un compromis : "droit à enrichir l’uranium" du côté de Téhéran et "fermeté" dans le camp occidental, comme l’a répété le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius.
Et depuis le début des discussions, la position de la France est vilipendée par l’Iran. Paris a été à nouveau critiquée mercredi par l'ayatollah et guide suprême iranien, Ali Khamenei, qui n'a pas goûté la visite de François Hollande en Israël cette semaine. L’Etat hébreu est "voué à la disparition", a répliqué Ali Khamenei. Ce à quoi François Hollande a répondu que ces propos "compliquent la négociation".
>>> Cette fermeté a des conséquences. Comme a pu le constater l’envoyée spéciale d’Europe 1 à Téhéran, la population ne mâche pas ses mots quand il s’agit d’évoquer les dirigeants français.
Un exemple frappant pour commencer : "Fabius" est devenu une insulte que les Iraniens font tourner en boucle sur les réseaux sociaux. Un journal satirique, sorte de Charlie Hebdo local, a de son côté créé de nouveaux mots en persan pour ne plus utiliser les mots "baguette", "fromage", "Peugeot".
Traduction :
- "Clef polyvalente" au lieu de "clef française".
- "4x4" au lieu de "Peugeot 206".
- "Barbari" (une variété du pain iranien) au lieu de "baguette".
- "Fromage Zarif" (le nom du ministre iranien des Affaires étrangères qui signifie délicat en persan) au lieu de "fromage français".
- "Tarte Nâséri" (marque de tarte iranienne) au lieu de "gâteau napoléonien".
Des Iraniens "très déçus". Les plus en colère sont les francophones. C’est le cas de cette famille rencontrée par l’envoyée spéciale d’Europe 1 dont le père est professeur de Français. Cette semaine, tous ses amis lui ont demandé pourquoi il continuait d’enseigner : "c’est un métier que j’aime. Mais depuis deux ou trois jours, j’ai plus envie de le faire. Je préfère faire chauffeur de taxi pendant une semaine. Je sais que les Iraniens sont très, très déçus du comportement du gouvernement français. Et ils ont raison. Je n’ai pas envie de soutenir les regards".
Sa mère est encore plus sévère. Pour cette réfugiée politique pendant dix ans en France, c’est comme si François Hollande l’obligeait à choisir entre l’Iran et la France. "J’ai senti que j’étais insultée. Maintenant, les gens sont complètement contre le gouvernement français, plus que l’Amérique", déplore-t-elle. Depuis plusieurs jours, certains l’invitent à ne plus "acheter du matériel français, à ne plus écouter les chaînes françaises". "C’est insupportable", lance-t-elle. Et si la France ne change pas de discours, un patron iranien confie qu’entre un contrat français et un contrat américain, il choisirait l’Américain.