L’INFO. "Malheureusement la loi ne nous permet pas de publier ce genre de chose". Voici la réponse obtenue, par nos confrères de Virgin radio (Groupe Lagardère, propriétaire d'Europe1) lorsqu’ils ont demandé à des journaux russes de faire paraître la publicité ci-dessus. Si ce refus n’est pas une grande surprise, la franchise avec laquelle chacun des médias russes contactés, a répondu est étonnante.
On aime les gays, et vous M. Poutine ? Il y a quelques jours, Virgin radio a contacté les régies publicitaires de trois médias russes : Argumenty I fakty, Izvestia et Kommersant. L’idée ? Faire paraître cette campagne de pub : "Virgin radio France aiment les homosexuels. Et vous Monsieur Poutine ?". L’idée d’interpeller directement le président russe n’est évidemment pas la meilleure méthode pour s’assurer une publication dans quelque média russe, mais la radio tente tout de même le coup.
Niet ! La réponse ne se fait pas attendre très longtemps : niet ! La campagne est refusée et ne sera pas publiée. "Nous nous attendions à ce que la publication de ce visuel soit difficile", confie Isabelle Champigneulle, directrice de la communication de Virgin radio, à Europe1.fr. "Mais nous ne pensions pas avoir des réponses aussi directes", ajoute-t-elle.
Un refus qui n’étonne pas Christophe Gascard, ancien correspondant pour TF1 à Moscou et aujourd’hui rédacteur en chef chez Press & Co. "C’est plutôt l’inverse qui aurait été étonnant", commente-t-il. "La Russie baigne dans un climat largement homophobe qui est renforcée par une loi contre la propagande homosexuelle, créée par le président lui-même", ajoute-t-il.
Une loi ouvertement homophobe. En effet, le président russe Vladimir Poutine a promulgué au mois de juin 2013 deux lois qui punissent tout acte de "propagande" homosexuelle devant mineur. Et c’est en se basant sur cette loi que les trois médias ont répondu à nos confrères. "Notre public est composé de lecteurs de tous les âges, y compris des gens de moins de 16 ans, l’âge de la majorité. Notre journal est très attaché aux valeurs de la famille et aux relations, traditionnelles, entre un homme et une femme", écrit Argumenty i fakty. "La promotion de relations sexuelles non-traditionnelles n’a donc pas sa place dans nos pages", conclut le journal.
Du côté du journal Izvestia, même rengaine. "Malheureusement la loi adoptée par la Douma [le parlement russe, NDLR], interdit la publication de ce genre de chose", a-t-on répondu. Et enfin, le journal Kommersant, l’une des principales publications en Russie, explique que "malheureusement il existe aujourd’hui des restrictions qui ne lui permettent pas de publier ce genre de message".
Plus besoin de prendre de pincettes. Et ce sont ces réponses, sans détour, qui ont surpris Virgin radio qui s’attendait à, au moins, une réponse un peu langue de bois. "Mais cela n’est pas du tout étonnant. La loi sur la propagande permet de cautionner ouvertement cette homophobie", analyse le journaliste Christophe Gascard, qui a passé trois ans à Moscou. Plus besoin donc de prendre de pincettes. "Aujourd'hui un homme qui tient la main d'un autre homme dans la rue, ou qui porte un drapeau arc en ciel risque une peine de prison", ajoute-t-il. En Russie, l'homosexualité était considérée comme un crime jusqu'en 1993 et comme une maladie mentale jusqu'en 1999.
Et la preuve a encore été apportée mercredi sur Europe 1 par l’ambassadeur de Russie en France, Alexandre Orlov. Invité de Thomas Sotto, il n’a pas hésité à parler de "prosélytisme".
"Tous les gens sont libres d'avoir leur orientation sexuelle. Tout ce que nous ne voulons pas c'est faire du prosélytisme auprès des jeunes. Une embrassade, ça ne gêne personne. Si vous allez plus loin, ça peut gêner… Mais c'est un faux problème", a-t-il assuré…
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