Si Ryan Holiday est expert dans un domaine, c'est dans celui de la manipulation. Cet Américain, responsable marketing de 25 ans, n'y connaît en revanche pas grand-chose à l'insomnie, aux disques vinyles ou à la course pieds nus. Ce qui ne l'a pas empêché de témoigner sur ces sujets pour le moins divers, et ce dans les plus grands médias américains, de la chaîne ABC News au prestigieux New York Times, à chaque fois sous son vrai nom. Dans un livre intitulé Faites moi confiance, je mens, le jeune homme dévoile le pot-aux-roses et explique comment il s'est livré à un tel manège.
Pour MSNBC, il s'est ainsi fait passer pour un employé de Burger King. Auprès de CBS, il a carrément inventé une anecdote de bureau embarrassante pour un article sur le sujet. Et à un journaliste de l'agence de presse Reuters, il a raconté que le portefeuille d'actions de ses parents avait été détruit par la crise financière, liste la RTBF.
Il avait engagé un assistant
Pour arriver à ses fins, Ryan Holiday a utilisé un service gratuit, baptisé Help a Reporter Out (Haro), qui met en relation des journalistes avec des témoins sur tous les sujets, explique Forbes. Ryan Holiday est même allé jusqu'à engager un assistant pour répondre à un maximum de demandes.
Son but : dénoncer les dérives des blogs et des médias, prêts, selon lui, à raconter n'importe quoi. "Un article bien fait et un article mal fait font le même nombre de clics", déplore le jeune homme, pour qui "les journalistes ne sont pas incités à faire du bon travail".
Difficile de s'en rendre compte
Roy Furchgott, le journaliste du New York Times auprès de qui Ryan Holiday s'est fait passer pour un collectionneur de disques vinyles, reconnaît qu'il est difficile de se rendre compte d'une telle supercherie. "Son témoignage n'était pas différent de celui des autres collectionneur", explique-t-il à Forbes, ajoutant que ces faux témoignages ne sont "pas inhabituels".
En France, une affaire similaire avait fait grand bruit il y a deux ans, rappelle Le Monde. Dans un dossier "Immigration Roms, allocations, mensonges… Ce qu'on n'ose pas dire", l'hebdomadaire Le Point publiait le témoignage de Bintou, 32 ans, femme de polygame. Sauf que Bintou s'appelait en réalité Abdel. Excédé par le traitement des banlieues dans les médias, cet habitant de Clichy-sous-Bois s'était tout simplement fait passer au téléphone pour une femme et avait raconté à son interlocuteur ce qu'il avait envie d'entendre.
"Nous avons été victimes d'un coup monté", s'était à l'époque défendu Le Point, affirmant que les premières victimes étaient "les lecteurs".