Et si 2012 était l’année du retour de la Birmanie dans le concert des nations ? Depuis plusieurs mois, la junte au pouvoir multiplie les signes d’ouverture en direction de la communauté internationale. Dernier exemple en date : l’officialisation mercredi de la candidature de l’opposante Aung San Suu Kyi aux prochaines législatives. La "Dame de Rangoun", libérée en novembre 2010, a passé la majeure partie de sa vie emprisonnée ou en résidence surveillée depuis 1990.
Le retour dans le jeu politique de la lauréate du prix Nobel de la paix est un geste fort. Il a d’ailleurs été salué par l’Union Européenne, qui prévoit un "examen général de sa politique" à l’égard de ce pays. Depuis plusieurs mois, les sanctions politiques à l’égard du régime ont été assouplies, comme le prouve la visite d’un certain nombre de représentants européens à Rangoun, notamment celle du ministre des Affaires étrangères Alain Juppé.
Dialogue avec les minorités ethniques
La Birmanie est aux mains des militaires depuis 1962. Mais l’arrivée au pouvoir en mars 2011 de l’ancien général Thein Sein, auparavant Premier ministre, a fait bouger les lignes.
Outre la participation de l’opposante Aung San Suu Kyi au jeu politique, plusieurs réformes ont été annoncées pour sortir le pays de son isolement. L’affaiblissement de la censure des médias et l’amorce d’un dialogue avec les minorités ethniques illustrent ce processus.
Dans certaines régions, des conflits opposent en effet le pouvoir central à des groupes ethniques depuis de nombreuses années. Les groupes de défense des droits de l’Homme ont dénoncé à plusieurs reprises des violations des autorités. "Des premiers pas ont été franchis avec le lancement de pourparlers pour aboutir à des cessez-le-feu", reconnaît Isabelle Dupuis, coordinatrice de l’association Info-Birmanie. "Il n’empêche que les accords préliminaires qui ont été signés ne signifient pas la fin des violences militaires. Les déplacements militaires et les viols continuent", tempère-t-elle.
Libération d’opposants
Autre signe de l’amorce d’un dialogue : la libération récente de plusieurs centaines de prisonniers politiques. Considérée comme un pré-requis par l’Union européenne pour assouplir les sanctions, cette annonce a été saluée unanimement. Les observateurs s’accordent cependant à dire que les mois qui suivent seront déterminants pour vérifier la sincérité du régime. "Ces libérations sont une bonne nouvelle, explique Isabelle Dupuis. Reste à savoir si ces opposants vont disposer d’une liberté d’action, notamment politique."
D’autant que la politique d’ouverture menée par Thein Sein n’est pas du goût de tous en Birmanie. Des dissensions existent au sein du régime entre les partisans d’une libéralisation et les tenants d’une ligne dure.
Scepticisme de la communauté internationale
Du côté des observateurs occidentaux, la prudence est de mise. Si certains, tels Alexandre Adler, évoquent désormais "un printemps birman", d’autres rappellent que jusqu’à présent, le quotidien des citoyens birmans n’a pas beaucoup changé.
Même si les relations diplomatiques ont repris doucement depuis avril 2011, les sanctions économiques mises en place depuis une vingtaine d’années par l’Union européenne, les Etats-Unis, le Canada et l’Australie sont toujours actives.