La libération de Shalit "ne changera rien"

L'adhésion de l'Etat Palestinien aux Nations Unies
L'adhésion de l'Etat Palestinien aux Nations Unies © Reuters
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Assiya Hamza , modifié à
INTERVIEW - La libération de Gilad Shalit peut-elle avoir un impact sur le processus de paix ?

Il est enfin libre. Après cinq ans de détention dans la bande de Gaza, le soldat franco-israélien Gilad Shalit a retrouvé la liberté mardi matin. L'accord, conclu entre le Hamas et les autorités israéliennes, a également permis la libération de 500 prisonniers palestiniens. Cet échange, sans précédent, permettra-t-il de relancer un processus de paix, au point mort depuis des années ?  Jean-Paul Chagnollaud est professeur de sciences politiques à l'université de Cergy-Pontoise et spécialiste de la question palestinienne. L'auteur de l'Atlas des Palestiniens, un peuple en quête d'un état, a répondu aux interrogations d'Europe1.fr.

Europe1.fr : l'échange de Gilad Shalit contre 477 prisonniers palestiniens peut-il avoir un impact sur le processus de paix ?

Jean-Paul Chagnollaud : A priori non. Ce sont des dossiers très cloisonnés. La question des prisonniers est très importante mais elle n'est absolument pas sur le même plan que la question de Jérusalem, de la colonisation ou des réfugiés. Il s'agit davantage d'un moment tactique que stratégique, pour les israéliens mais aussi pour le Hamas. Le gouvernement israélien avait intérêt à renforcer le Hamas et le Hamas à l'être. Si les Israéliens voulaient relancer le processus de paix, ils se seraient adressés à l'Autorité palestinienne et à Mahmoud Abbas.

Europe1.fr : Quels sont les bénéfices pour chacune des deux parties ?

Jean-Paul Chagnollaud : Cet accord permet aux autorités israéliennes de sortir d'un relatif isolement et de montrer qu'elles sont prêtes à faire des concessions. Accepter de libérer des prisonniers responsables d'attentats, ce n'est pas rien. Il permet aussi de diminuer l'influence du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Le Hamas et le Fatah ont signé un accord en mai 2011 qui prévoyait la mise en place d'un gouvernement d'union nationale mais aussi des élections avant mai 2012. Le temps presse. Aujourd'hui, le Hamas est renforcé. Il peut reprendre les négociations avec le Fatah car désormais la situation est moins déséquilibrée. Les Palestiniens souhaitent d'ailleurs cette union.

Europe1.fr : Un gouvernement d'union nationale pourrait donc permettre la reprise des négociations de paix avec Israël ?

Jean-Paul Chagnollaud : Cela ne changera pas la donne. Les Israéliens diront qu'ils ne veulent pas négocier avec le Hamas et à l'inverse un gouvernement sans le Hamas sera considéré comme non représentatif. Ils ne veulent pas résoudre le conflit. Ils se contentent de le gérer. Dans le cas contraire, ils surseoiraient à la colonisation.

Europe1.fr : Quel avenir pour le processus de paix ?

Jean-Paul Chagnollaud : Il n'y a pas de processus de paix aujourd'hui. On est prisonniers des mots.Tout le monde s'accorde à dire que la situation dans les territoires occupés est intenable. Je ne vois pas d'évolution concrète. Les américains sont aux abonnés absents et le rapport de force ne changera pas.

Europe1.fr : La demande d'adhésion de la Palestine à l'ONU peut-elle changer la donne ?

Jean-Paul Chagnollaud : L'adhésion de l'Etat palestinien, même en tant que pays observateur, va changer sa place sur le plan international. Avec le soutien de l'Unesco, les Palestiniens vont pouvoir  sauvegarder les lieux du patrimoine palestinien en Cisjordanie, aujourd'hui disputés par les israéliens. Cela va vraiment contraster avec la scène diplomatique où les Israéliens sont en force. C'est important de renforcer la posture diplomatique des Palestiniens.