Il était un des derniers piliers de la "Françafrique". La mort, lundi, d’Omar Bongo, relance le débat sur les relations très particulières que la classe politique française a longtemps entretenues avec le continent africain.
Le premier à rompre le silence qui entoure habituellement ce sujet est Valéry Giscard d'Estaing qui a affirmé mardi matin sur Europe 1 que le président gabonais avait financé en 1981 la campagne présidentielle de Jacques Chirac, qui se présentait contre lui au premier tour.
Charles Pasqua, lui-même figure "françafricaine" et qui bénéficia d'un non lieu dans l'affaire Elf de financements occultes aux ramifications gabonaises, a lâché quelques phrases sibyllines. Il a assuré que les financements occultes relevaient du "fantasme", et a rappelé qu'Omar Bongo "avait des amis aussi bien à droite qu'à gauche". Avant de suggérer de s'adresser "au niveau des présidents de la République".
Pour l’ancienne juge d’instruction en charge de l’affaire Elf où le nom d’Omar Bongo apparait, le président du Gabon a "servi l’intérêt de la France", notamment par la "manne pétrolière" et "l’uranium afin d’obtenir des prix aussi bas que possible".
Selon Eva Joly : "Ce système marchait encore récemment. Nicolas Sarkozy a d’ailleurs rendu visite le 17 mars dernier au Président Bongo, juste avant son élection pour "demander des conseils."
"Si la France restituait les fonds indument payé par Bongo pour des services imaginaires à nos hommes politiques, on pourrait construire au Gabon des hôpitaux, des maternités et faire baisser le taux de mortalité infantile", conclut la nouvelle députée européenne.
Le président Nicolas Sarkozy, qui avait promis de rompre avec la "Françafrique", avait reçu Omar Bongo à l'Elysée moins de trois semaines après son élection. Bongo aurait même obtenu en 2008 le départ du secrétaire d'Etat à la Coopération Jean-Marie Bockel, qui voulait "signer l'acte de décès de la Françafrique".
Globalement, les hommes politiques ont couvert le défunt de louanges. En 41 ans de pouvoir, Omar Bongoaura connu tous les présidents de la Ve République. "Lui-même à l'origine agent de renseignement français installé (au pouvoir) par la France, il a continué," explique Comi Toulabor, directeur de recherches au Centre d'étude d'Afrique noire de Bordeaux.
Ce décès signera-t-il la vraie fin de la "Françafrique"? Comi Toulabor en doute. "On voit de nouvelles générations, de nouvelles têtes, mais très peu de choses changent effectivement. Surtout s'il y a une succession dynastique", comme on en parle pour le Gabon.