Alors que la manifestation prévue samedi à Alger a été réprimée par les autorités, la vague de contestation sociale et politique s'est poursuivie dans de nombreux pays du monde arabe. Dimanche, ce sont les Marocains qui sont descendus dans la rue.
Au Maghreb
Au Maroc. Des manifestations pacifiques pour réclamer des réformes politiques dans le pays ont eu lieu dimanche dans plusieurs villes, dont Rabat, Casablanca et Marrakech. Des incidents se sont produits à Marrakech, où un groupe de 150 à 200 personnes étrangères à la manifestation ont attaqué et pillé des magasins et lancé des pierres contre un édifice public ainsi qu'un établissement de restauration rapide MacDonalds. A Larache, des jeunes gens s'en sont pris à des édifices publics, notamment un poste de gendarmerie et un poste de douane.
En Tunisie. Des milliers de personnes ont manifesté dimanche à Tunis pour réclamer la démission du gouvernement de transition de Mohamed Ghannouchi.Quelque 4.000 personnes ont manifesté devant la Kasbah, siège de la Primature, reprenant le slogan de la révolution qui a provoqué la chute de l'ancien régime "Ben Ali Dégage". Mohamed Ghannouchi a été le Premier ministre de Zine El Abidine Ben Ali de 1999 jusqu'à sa chute le 14 janvier. A Tunis, l'ambassadeur de France, Boris Boillon, a par ailleurs présenté ses "excuses" samedi aux Tunisiens à la télévision nationale pour avoir répondu jeudi à des questions de journalistes d'une manière qui a pu paraître "hautaine", quelques heures après une manifestation de 500 personnes réclamant son départ.
En Algérie. Comme la semaine dernière, la manifestation de samedi à Alger a été très tôt bloquée par un impressionnant effectif de police et une dizaine de manifestants ont été blessés dans les heurts qui ont suivi, selon la Coordination nationale pour le changement et la démocratie. Parmi eux, un député du RCD, Tahar Besbes, a été grièvement blessé.
Au Proche-Orient
En Libye. Au moins 173 personnes ont été tuées en Libye depuis le début de la contestation mardi contre le régime du président Mouammar Kadhafi, selon le dernier bilan fourni dimanche par l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW) citant des sources hospitalières. Il y aurait aussi un grand nombre de blessés, mais aucun chiffre exacte n'a été communiqué. Une cinquantaine de dirigeants religieux libyens ont lancé un appel solennel à la la "fin du massacre" à Benghazi.
En Egypte. Le gouvernement, chargé des affaires courantes, doit se réunir samedi alors que l'armée, aux rênes de l'Egypte depuis la chute du président Hosni Moubarak le 11 février, a affirmé la veille qu'elle ne tolèrerait pas de manifestation qui nuise à l'économie du pays et qu'elle y répondrait. Les autorités égyptiennes ont par ailleurs indiqué qu'elles lèveraient l'état d'urgence d'ici six mois.
Yémen. La police yéménite a tué dimanche un manifestant à Aden, dans le sud du pays. Ce décès porte à onze le bilan des personnes tuées dans cette ville depuis le 13 février, selon un bilan établi par l'AFP. L'opposition parlementaire a annoncé dimanche sa décision de se joindre au mouvement de contestation du régime du président Ali Abdallah Saleh mené notamment par des étudiants, affirmant qu'elle ne reprendrait pas le dialogue avec le pouvoir sous les armes. Le président Saleh a de son côté renouvelé dimanche son appel au dialogue, se déclarant prêt à "accéder aux demandes de l'opposition si elles sont légitimes".
Au Moyen-Orient
A Bahreïn. Des milliers de Bahreïnis occupaient dimanche la place de la Perle à Manama, épicentre de la contestation du régime, alors que l'opposition se concertait avant d'entamer un dialogue avec le pouvoir. Les groupes d'opposition réclament des réformes dans le petit royaume insulaire du Golfe, où la répression du mouvement anti-régime a fait six morts en moins d'une semaine. Le prince héritier de Bahreïn, Salman ben Hamad Al-Khalifa, a ordonné samedi à la police de "rester à l'écart des rassemblements". Les syndicats ont lancé un mot d'ordre de grève générale à partir de dimanche.
En Irak. Au moins huit personnes, quatre policiers et quatre manifestants, ont été blessées dimanche lors d'affrontements à Souleimaniyeh, seconde ville du Kurdistan irakien, théâtre d'incidents depuis jeudi.
Environ 1.500 personnes ont tenté de marcher vers la rue Salem, au centre-ville, où jeudi deux jeunes manifestants avaient péri alors que 54 autres avaient été blessés. Samedi, plusieurs centaines de veuves et d'orphelins, dont les proches ont été victimes de violences depuis la chute du régime de Saddam Hussein en 2003, ont manifesté à Bagdad pour réclamer une amélioration de leurs conditions de vie.
En Iran. Les autorités iraniennes ont brièvement arrêté dimanche la fille de l'ancien président Akbar Hachemi Rafsanjani pour sa participation à un rassemblement interdit de l'opposition. "Faezeh Hachemi Rafsanjani a été remise en liberté après avoir affirmé qu'elle était sortie faire des courses pour s'acheter des étoffes", a annoncé l'agence de presse officieuse iranienne Fars. De son côte, l'ancien Premier ministre Mir Hossein Moussavi, un des dirigeants de l'opposition réformatrice, est isolé chez lui, alors que des dizaines de milliers de partisans du régime avaient réclamé vendredi son exécution, ainsi que celle de l'ex-président du Parlement Mehdi Karoubi, autre chef de file de l'opposition. Les autorités ont mis en garde contre toute manifestation de l'opposition dimanche, après la publication par des sites d'opposition, d'un appel à un rassemblement.
De 300 à 400 personnes ont manifesté dimanche devant l'ambassade de Libye au Caire contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, dont un mouvement de contestation violemment réprimé réclame le départ.
"Le peuple veut la chute du colonel" Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis plus de 40 ans, "Egypte, Libye, une seule main", ont scandé les manifestants.
Une grande pancarte disait simplement "Benghazi", du nom de la deuxième ville du pays et bastion des opposants du régime, située à 1.000 km à l'est de Tripoli.
Une autre pancarte en appelait au président américain Barack Obama, affirmant: "Obama, il s'agit d'humanité, pas de pétrole. Aide-nous".
Au moins 173 personnes sont mortes depuis le début de la révolte mardi selon l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW).