L'INFO. Il était considéré comme le "Schindler" italien. En réalité, Giovanni Palatucci, ce policier crédité d'avoir sauvé quelque 5.000 Juifs dans sa ville de Fiume entre 1940 et 1944, était... un collaborateur nazi, selon les conclusions d'une équipe de chercheurs.
Mort à Dachau en février 1945 à l'âge de 36 ans, il avait été honoré du titre de "Juste parmi les nations" par le Mémorial de Yad Vashem à Jérusalem en 1990, et déclaré "martyr" par le pape Jean Paul II, une étape vers la béatification. Mais une étude menée par une douzaine de spécialistes ayant revu près de 700 documents vient de faire voler en éclat ce portrait héroïque.
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Un exécuteur de la loi raciale. Dans un courrier envoyé le 7 juin 2013, le Centre souligne notamment que "Giovanni Palatucci n'a jamais été chef de la police de Fiume. Il n'y avait pas 5.000 juifs à Fiume en 1943, la région en fait en comptait à peine plus de 500, dont 80% ont fini à Auschwitz", rappelle Natalia Indrimi, la directrice du Centre."C'était un exécuteur enthousiaste de la loi raciale, et après avoir prêté serment à la république sociale de Mussolini, il a collaboré avec les Nazis", a-t-elle affirmé. "C'était l'un des nombreux employés du gouvernement qui travaillaient dans la machine de persécution, comme si c'était n'importe quel autre travail", a-t-elle ajouté.
Il a continué à travailler sous l'Occupation allemande. Dans son courrier au musée de l'Holocauste, Natalia Indrini, qui a coordonné les recherches, souligne également que "Palatucci n'a pas non plus envoyé des centaines de Juifs à Campagna, pour qu'ils soient protégés par son oncle" qui en était l'évêque (...) Seulement 40 Juifs ont été internés à Campagna, et ce n'était pas dû à un ordre de Palatucci", souligne-t-elle. Le courrier dénonce aussi l'idée selon laquelle le policier aurait détruit des documents concernant des Juifs de Fiume, pour éviter qu'ils ne soient envoyés en camp de concentration. "Ces cinq dernières années, ces documents ont été la source principale d'information pour les historiens", a souligné Natalia Indrimi. "Ils font tous partie des archives d'Etat de Rijeka (le nom actuel de la ville, située en Croatie) et tous les historiens peuvent les consulter". Et les recherches montrent aussi que "Palatucci a continué à travailler durant l'Occupation allemande, et à fournir des informations sur les quelques Juifs qui vivaient encore dans le secteur".
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Un prix spécial. Palatucci est pourtant célébré en Italie par des places publiques et des promenades, dont la dernière a été inaugurée dimanche dernier à Polino. En mai 2005, la ligue anti-diffamation (ADL), basée à New York, lui avait décerné un prix spécial, confortant la légende d'"un homme ayant fait tout ce qu'il pouvait pour sauver des Juifs entre 1940 et 1944, fabriquant des faux papiers et visas, livrant de l'argent et de la nourriture à ceux qui se cachaient, et les avertissant" quand il entendait parler d'une raffle imminente.
Ces dernières années, certains chercheurs avaient cependant commencé à douter de cette histoire Palatucci, qui projetait une lumière favorable sur l'Italie d'après la guerre, mais dont le gouvernement italien lui-même disait n'avoir aucune trace jusqu'en 1986. Après cette découverte, le musée de l'Holocauste à Washington a annoncé qu'il avait retiré le nom Palatucci de son site Internet, et allait également le retirer d'une exposition en cours, après avoir reçu ces nouvelles informations du Centre Primo Levi de New York.