"Le Sénégal a honte. Le Sénégal est meurtri. Le processus de coup d'Etat constitutionnel est consommé. 52 ans de construction démocratique viennent d'être balayés", a déclaré Youssou Ndour, lundi sur RFI. "Le Sénégal et son peuple ont mal. Nous avons été trahis par cette décision honteuse. J'ai dit bien honteuse", a-t-il poursuivi au sujet de la liste des candidats à la présidentielle sénégalaise validée, dans la nuit de dimanche à lundi, par le Conseil constitutionnel.
Un appel lancé à la communauté internationale
La star internationale de la chanson et homme d'affaires avisé, a même tiré la sonnette d'alarme : "J'appelle, donc, toutes les forces vives de ce pays, nos frères africains, la communauté internationale à exprimer son désaccord face à ce coup d'Etat institutionnel et constitutionnel. Le combat continue, parce que Dieu est avec les justes".
La plus grande voix d'Afrique a plusieurs raisons d'exprimer sa colère. Il conteste la validation de la candidature du chef de l'Etat sortant, Abdoulaye Wade, 85 ans, à briguer un troisième mandat, alors que la Constitution n'en permet que deux.
La Constitution modifiée en 2001
Un argument jugé non recevable pour l'entourage de Wade au motif que lorsqu'il a été élu en 2000 pour la première fois, la Constitution ne limitait pas le nombre de mandats. Il l'a modifiée en 2001 pour limiter à deux leur nombre. Le chef de l'Etat affirme aujourd'hui que ces modifications n'étaient pas rétroactives, et que son "premier" mandat doit être celui qui a suivi l'adoption de la loi, c'est-à-dire celui qui a débuté au moment de sa réélection en 2007. Une interprétation retenue par le Conseil constitutionnel.
Mais surtout, Youssou Ndour récuse l'invalidation de sa propre candidature au motif qu'il n'avait pas présenté les 10.000 signatures exigées pour valider sa participation à l'élection. Au total, le Conseil constitutionnel a validé la candidature de 14 prétendants, dont trois anciens premiers ministres de Wade, devenus des opposants.
De son côté, la France regrette que "toutes les sensibilités politiques ne puissent être représentées", a déclaré lundi le ministère des Affaires étrangères.
Youssou Ndour menacé ?
A moins d'un mois des élections présidentielles, les tensions montent à Dakar. L'opposition menée par le M23, qui regroupe plusieurs partis, des organisations de la société civile et des personnalités indépendantes, lancé samedi un appel à la "résistance" contre Abdoulaye Wade. Conséquence, des violences ont éclaté ce week-end sur une place de la capitale.
Des manifestants anti-Wade ont jeté des pierres sur les policiers qui ont riposté à coups de gaz lacrymogène et de matraque. Les jeunes ont également mis le feu à des pneus et des courses-poursuites entre eux et les policiers se sont engagées dans les rues adjacentes à la Place de l'Obélisque.
Par ailleurs, le chanteur sénégalais Youssou Ndour a fait état samedi à Dakar de "menaces" contre sa personne physique, après que, selon un de ses porte-parole, il a été "malmené" par des policiers en tentant d'aller soutenir un responsable de la société civile arrêté.
L'élection du nouveau chef de l'Etat pour un mandat de sept ans, renouvelable une fois, est prévue le 28 février prochain.