Il s'intitule The Spear, La lance. Ce tableau, représentant le président sud-africain Jacob Zuma nu, parties génitales bien en évidence, a provoqué l'ire du Congrès national africain, l'ANC. Le parti, au pouvoir depuis 1994, réclame le décrochage de cette oeuvre du plasticien Brett Murray, présentée jusqu'au 16 juin par la Goodman Gallery, une galerie privée de Johannesburg. Le ministère de la Justice a quant à lui porté plainte pour "injure". Le tribunal qui devait trancher dans la journée de mardi a repoussé sa décision à jeudi. Car entre-temps, l'oeuvre a été vandalisée.
L'imposante toile, grandeur nature soit 1,85m, est directement inspirée d'une célèbre affiche soviétique, celle de Lénine. Le chef de l'Etat sud-africain est représenté débout, sexe exposé. Marié à six femmes, père de 21 enfants, Jacob Zuma est un polygame assumé mais qui a souvent été attaqué sur sa vie sexuelle débridée.
La "dignité" du président "abîmée"
Le parti présidentiel, qui fête son centenaire cette année, s'est "indigné" que son chef soit représenté d'une "façon scandaleuse et offensante". "L'image et la dignité de notre président, en tant que président de l'ANC, président de la République et être humain, est abîmée par cette soi-disant œuvre d'art de Brett Murray à la Goodman Gallery", a déclaré l'ANC dans un communiqué.
"Nous avons demandé à nos avocats de saisir les tribunaux pour contraindre Brett Murray et la Goodman Gallery de décrocher le portrait et de le retirer de son site Internet, et aussi de détruire tout le matériel promotionnel", a-t-il ajouté.
Même indignation du côté de la présidence. "Nous sommes stupéfaits de la manière grossière et blessante avec laquelle cet artiste dénigre la personne et le bureau du président de la République d'Afrique du Sud", a-t-elle déclaré dans un communiqué. Si la présidence dit reconnaître le droit à la liberté d'expression, elle souligne que "personne n'a le droit de violer la dignité et des droits des autres en exerçant ses propres" droits.
L'image de l'ANC écorné
La Lance, allusion à l'arme traditionnelle des guerriers zoulous et à la lance du logo de l'ANC, fait d'autant plus polémique qu'elle fait partie intégrante d'une exposition intitulée Salut au voleur. Allusion directe aux affaires de corruption qui minent l'ANC, Salut au voleur détourne les symboles du parti qui a libéré l'Afrique du Sud de l'apartheid et joue avec les canons du réalisme socialiste.
La toile s'était déjà vendue pour 12.900 euros. L'heureux propriétaire est un collectionneur allemand. Mais la chaîne d'information e-news a montré qu'un premier individu a d'abord peint des croix rouges sur la tête et le sexe du personnage, avant qu'un second ne barbouille le tableau de peinture noire. La Goodman Gallery, une galerie privée de Johannesburg où était exposée l'oeuvre, a immédiatement été fermée. En attendant que la justice ne tranche.