Les électeurs ont commencé leur devoir civique comme prévu à 6 heures locales dimanche, dans la capitale Rangoun. Les bureaux doivent fermer à 16 heures. La lauréate du prix Nobel de la paix, considérée il y a encore deux ans comme l'ennemie publique numéro un par la junte alors au pouvoir, est largement favorite à Kawhmu, une circonscription rurale à deux heures de Rangoun où elle affronte le verdict des urnes pour la première fois de sa vie.
45 sièges en jeu
Au total, 45 sièges sont en jeu. 44 sont brigués par la Ligue nationale pour la démocratie (LND), le partie d'Aung San Suu Kyi. 37 à la chambre basse du parlement, six à la chambre haute et deux dans des chambres régionales.
Au terme d'un processus de transition non violent et sous contrôle de l'armée, cette nouvelle équipe a proposé à Suu Kyi d'intégrer l'échiquier politique officiel. Selon tous les analystes, le gouvernement a lui-même intérêt à voir l'opposante triompher sous le regard de la communauté internationale.
Aung San Suu Kyi a dénoncé une campagne pleine d'irrégularités. Mais elle a aussi revendiqué le besoin de participer, donc de légitimer, le processus en cours pour changer les choses de l'intérieur. "Une fois au parlement, nous pourrons travailler pour une véritable démocratisation", a-t-elle justifié vendredi.
Des problèmes de santé mineurs
Après avoir mis un terme à ses déplacements il y a quelques jours à la suite de problèmes de santé mineurs, Suu Kyi a quitté samedi sa maison de Rangoun pour rejoindre Kawhmu. "J'ai pas mal d'inquiétudes. Nous devons attendre et voir comment ça se passe", a admis Nyan Win, porte-parole de la LND, sans autre précision. Suu Kyi "va bien", a-t-il cependant précisé. "Elle est fatiguée mais il n'y a pas de raisons de s'inquiéter" sur ce point.
Après des années à dissimuler leur soutien pour une femme qui s'est muée en icône de la résistance à la junte, ses partisans laissaient depuis quelques semaines éclater leur joie. La chanson "Notre mère est de retour" est ainsi devenue un tube de campagne. Et sur les trottoirs, les habitants étaient visiblement heureux de pouvoir enfin exprimer librement leur soutien. Aung San Suu Kyi avait triomphé aux élections de 1990, sans que la junte ne reconnaisse jamais les résultats. Elle était encore en résidence surveillée vingt ans plus tard, en novembre 2010, lors de législatives boycottées par la LND et qualifiées de mascarade par l'Occident.
La suprématie du parti au pouvoir
Le gouvernement, composé d'anciens militaires réformateurs arrivés au pouvoir il y a un an, tente de prouver que ses réformes politiques sont sincères et peuvent justifier la levée des sanctions occidentales qui étranglent l'économie du pays.
Quels que soient les résultats, le pouvoir n'a pour sa part rien à craindre de ces partielles. Le Parti de la solidarité et du développement de l'Union (USDP), créé de toutes pièces par l'ancienne junte, avait revendiqué environ 80% des sièges en 2010. Et un quart des parlementaires sont, en vertu de la Constitution, des militaires d'active désignés en marge du processus électoral.