Rues désertées, échanges de coups de feu sporadiques, pillages dès que la nuit tombe : la tension dans la capitale économique de la Côte d’Ivoire est telle que la France a commencé à organiser le rassemblement de ses expatriés en vue d’une possible évacuation. D’autant que l’annonce, faite par les forces pro-Ouattara, d’une "offensive rapide" pour réduire les bastions de Laurent Gbagbo dans la métropole ivoirienne laisse augurer une détérioration de la situation.
Lundi soir, l'armée française a annoncé avoir sous sa protection au total 1.900 étrangers. La décision de ce regroupement a été prise dimanche par les autorités françaises qui ne parlent pas jusqu'à présent d'opération d'évacuation. La France a par ailleurs envoyé lundi 150 soldats supplémentaires à Abidjan, ce qui porte l'effectif de la force Licorne à environ 1.650 hommes.
Trois points de regroupement
"Les opérations de regroupement ont commencé sur la base du volontariat. Deux nouveaux points de regroupement ont été établis, l'un à l’hôtel le Wafou au sud des ponts et l'autre à l’ambassade de France au Nord", a précisé lundi le ministère français des Affaires étrangères.
Le troisième point de regroupement est le camp militaire français de Port-Bouët où plus de 1.650 ressortissants étrangers, dont environ la moitié de nationalité française, avaient déjà trouvé refuge dimanche matin. 167 étrangers, dont des Français et des Libanais, ont déjà quitté Abidjan pour Dakar, via Lomé, a précisé la force française Licorne.
Environ 12.200 Français vivent actuellement en Côte d'Ivoire, dont 11.800 à Abidjan et 7.300 avec la double nationalité, selon les chiffres fournis par le ministère des Affaires étrangères. 447 d'entre eux sont déjà partis, ont indiqué les autorités françaises.
Inquiétude de la communauté internationale
La Commission européenne a appelé lundi Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo à "protéger les civils" et à tout faire pour éviter de faire basculer "davantage" leur pays dans la guerre civile.
En réponse, le gouvernement contesté de Laurent Gbagbo a "rassuré la communauté internationale qu'en dépit de manœuvres de la France tendant à semer la mort en Côte d'Ivoire, les Forces de défense et de sécurité (FDS) assurent la sécurité des ressortissants français", selon un bandeau déroulant de la télévision publique, tenue par les pro-Gbagbo.
Une déclaration à prendre avec des pincettes, le régime Gbagbo ayant déjà orchestré, via les "Jeunes Patriotes", une campagne ouvertement anti-Français à l’automne 2004. Si le nombre de victimes avait été très limité, souvent des morts liées à des conflits personnels, les vols et destructions de biens avaient été quasi-systématiques.