Les Français "identifiés comme ennemis"

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Gilles Kepel, spécialiste de l'islam, décrypte les conséquences du message de Ben Laden.

Pourquoi Ben Laden vise-t-il la France ?

"Le terrorisme a horreur du vide. La mouvance islamiste radicale, dont Ben Laden est le symbole, voit que la France est dans une situation particulièrement difficile. On a eu un clivage important cet été avec la polémique sur les Roms, la loi sur l'interdiction du port du voile intégral, etc. Et le sentiment de ces mouvements, c'est que la France est fragile et donc c'est un lieu où ils peuvent investir, en terme d'action, sans grand risque et ça peut rapporter gros."

Doit-on craindre des attentats sur le territoire français ?

"C'est difficile à dire. Pour le moment, il y a un "jeu" dans la bande sahélienne, où sept personnes qui travaillent pour Areva ont été enlevées. Le mouvement Al-Qaïda a été écrasé dans certains territoires, comme l'Arabie Saoudite ou le Pakistan, et la bande sahélienne apparaît comme une bonne opportunité. C'est aussi l'occasion de pointer les contradictions de la France dans la région."

Ce message va-t-il compliquer les négociations pour la libération des otages français ?

"Oui, ça peut être l'occasion de faire monter les prix, très significativement. Le message fait explicitement référence à l'interdiction du port du voile intégral et c'est assez ambigü : Ben Laden peu apparaître comme une sorte de héros pour tous ceux qui sont contre cette loi en France, mais ça ne marche pas toujours. Quand Christian Chesnot et Georges Malbrunot ont été enlevés en 2004, leurs ravisseurs menaçaient de les tuer si la loi sur les signes ostentatoires n'était pas retirée, mais les Français d'origine musulmane avaient massivement manifesté leur horreur. Finalement, ils avaient été libérés et cette agitation autour de la loi était retombée."

Les soldats français en Afghanistan sont-il menacés ?

"Les talibans sont très proches, idéologiquement et opérationnellement, d'Al-Qaïda. Mais il est difficile de dire dans quelle mesures les Français vont être ciblés spécifiquement. Mais il est clair qu'ils vont être particulièrement identifiés comme des ennemis."