Pour la première fois depuis la chute de Ben Ali, les Tunisiens vont avoir des élections libres pour mettre en place une Assemblée constituante. Face à la montée du parti islamiste Ennahda, interdit sous Ben Ali et donné favori, l'inquiétude grandit chez les Tunisiennes. Elles souhaitent avant tout préserver leur statut, l'un des plus avancés du monde arabe.
La vigie des droits des femmes en Tunisie, l'avocate Radhia Nasraoui, opposante historique à Ben Ali est candidate pour le Parti communiste. Son grand regret ? Être l'une des rares femmes tête de liste de cette élection et probablement après l'élection, l'une des rares élues sur les bancs de l'Assemblée constituante.
"On les combattra s'ils veulent toucher à nos droits, à nos acquis en tant que femmes. Ils vont quand même essayer parce que c'est leur idéologie", explique Radhia Nasraoui au micro d'Europe 1.
"On nous parle déjà du travail à mi-temps pour les femmes. C'est une atteinte. Pourquoi est-ce que les femmes vont travailler la moitié d'une journée ?", remarque l'avocate. "Les hommes vont travailler toute la journée. Ils seront toujours les chefs"", conclut la candidate communiste.
"C'est leur idéologie" :
Le parti islamiste, lui se veut rassurant. Pas question de toucher aux droits de la femme. "Nous sommes un parti moderne et tolérant", répète-t-on à tous les étages du siège de campagne à Tunis.
sur les murs, rien ou presque ne fait référence à la religion. On exhibe plutôt les affiches d'une candidate sans voile ou d'un blogger branché. Mais sur le terrain, changement d'ambiance.
Le double discours des islamistes
Hamani, une jeune étudiante a vu les militants d'Ennahda parler de religion de manière beaucoup plus incisive.
"J'ai assisté à plusieurs réunions et ce n'était pas le même discours", raconte Hamani, une jeune étudiante habitant une banlieue populaire du nord de Tunis.
"Ils ciblent des gens ayant une faible personnalité. Ils ont plusieurs discours. Comment les croire ?", poursuit Hamani. "De toutes les façons, il sera impossible que les femmes restent à la maison. La Tunisie est presque dirigée par les femmes", précise l'étudiante.
Ennahda menace
A la sortie d'une mosquée, Mahdi, lui, trouve Ennahda trop timoré, pas assez religieux. Il en a parlé avec son père qui milite pour le parti islamiste.
"Il m'a dit qu'il fallait y aller doucement. "On prend le pouvoir et après on parle avec les gens pour qu'ils retournent à la vraie religion musulmane"", explique Mahdi. "C'est une stratégie bien sûr. Il y a des gens en Tunisie qui ne veulent pas le voile ou le niqab. C'est dieu qui l'a prescrit", affirme le jeune homme.
Les dirigeants d'Ennahda sont ambitieux. Ils visent 40% des voix et sont bien décidés à ne pas se laisser voler leur victoire annoncée. S'ils s'estiment lésés par les résultats, ils descendront dans la rue.