Il y a d'abord eu Mona al-Tahawy, une éditorialiste américano-égyptienne qui a décrit jeudi sur Twitter le calvaire qu'elle a enduré pendant 12h. Puis Caroline Sinz, une journaliste de France 3, a révélé le même jour avoir elle aussi été victime d'agression sexuelle.
"La pire des agressions sexuelles"
La première, Mona al-Tahawy, a détaillé sur Twitter les gestes obscènes que des officiers égyptiens lui ont fait subir lors d'une garde à vue. "En plus de m'avoir battue, les chiens de (policiers anti-émeutes) m'ont fait subir la pire des agressions sexuelles", relate-t-elle sur son compte. "Cinq ou six (policiers) m'ont touché et pincé les seins et mes parties génitales et je ne pouvais plus compter le nombre de mains qui essayaient d'entrer dans mon pantalon", précise-t-elle encore.
Libérée, la journaliste poste, toujours sur Twitter, des photos de ses membres plâtrés. "Des radiographies montrent des fractures à mon bras gauche et ma main droite", explique-t-elle.
"J'ai cru que j'allais mourir"
La seconde, Caroline Sinz, accuse, elle, des hommes en civil. "Nous étions en train de filmer dans la rue Mohamed Mahmoud quand nous avons été assaillis par des jeunes de quatorze ou quinze ans", a-t-elle raconté, en faisant état "d'attouchements". La journaliste et son cameraman ont ensuite été entraînés "manu militari" par un groupe d'hommes vers la place Tahrir et se sont retrouvés séparés.
"Nous avons alors été agressés par une foule d'hommes. J'ai été tabassée par une meute de jeunes et d'adultes qui ont arraché mes vêtements" et qui ont procédé à des attouchements répondant "à la définition du viol", a-t-elle poursuivi. "Quelques personnes ont essayé de venir m'aider sans y parvenir. J'étais lynchée. Cela a duré environ trois quarts d'heure jusqu'à ce qu'on puisse m'extraire. J'ai cru que j'allais mourir", a-t-elle dit, en ajoutant que le cameraman avait aussi été "tabassé".
Finalement secourue par des Egyptiens présents sur les lieux, Caroline Sinz peut rejoindre son hôtel, où elle est assistée par l'ambassade de France au Caire avant de consulter un médecin.
Des témoins gênants
Ces deux affaires rappellent évidemment celle de Lara Logan, l'une des principales correspondantes à l'étranger de la chaîne CBS. La journaliste avait déjà raconté avoir été victime d'une agression sexuelle au Caire le 11 février dans le secteur de Tahrir, le jour même de la chute du président Hosni Moubarak.
"Pendant un temps très long, ils m'ont violée avec leurs mains", avait-elle dit au New York Times à son retour aux Etats-Unis, en ajoutant que l'agression avait duré une quarantaine de minutes et avait été menée par un groupe de deux à trois cents hommes.
L'organisation Reporters Sans Frontières (RSF) a dénoncé jeudi les conditions de travail des journalistes couvrant les troubles en Egypte, qui ont fait officiellement 38 morts dont une trentaine aux abords de Tahrir. "La chaos qui règne au Caire et les graves violations des droits de l'Homme qu'il engendre n'ont rien à envier aux heures noires du premier épisode révolutionnaire de janvier-février 2011", a écrit RSF dans un communiqué.
"Les professionnels de l'information sont les témoins gênants du déclin de l'armée au pouvoir" ajoute RSF, qui "s'inquiète d'autant plus de la répression qui pourrait s'accentuer à leur encontre".