Alors que l'objectif avoué de l'Otan était jusqu'à maintenant d'empêcher les assauts contre les civils en Libye, c'est désormais le colonel Kadhafi qui est clairement visé dans une tribune commune des présidents américain, français et du Premier ministre britannique. Après s'être réunis jeudi à Berlin, Nicolas Sarkozy, Barack Obama et David Cameron jugent vendredi "impossible d'imaginer que la Libye ait un avenir avec Kadhafi".
Les trois dirigeants y soulignent la nécessité de continuer les opérations militaires pour accélérer le départ de Mouammar Kadhafi et permettre une transition. "Il ne s'agit pas d'évincer Kadhafi par la force. Mais il est impossible d'imaginer que la Libye ait un avenir avec Kadhafi (...) il est impensable que quelqu'un qui a voulu massacrer son peuple joue un rôle dans le futur gouvernement libyen", écrivent-ils dans quatre quotidiens.
Que l'Otan ne lâche pas prise
Pour accélérer le départ du numéro un libyen, ils estiment que "l'Otan et les partenaires de la coalition doivent maintenir leurs opérations afin que la protection des civils soit maintenue et que la pression sur le régime s'accroisse". Les Etats-Unis ont toutefois refusé jeudi de revenir en première ligne en Libye.
Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a indiqué à la presse qu'il en avait parlé à la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, en marge de la réunion des chefs de la diplomatie de l'Otan à Berlin. Mais les Américains, qui ont retiré une cinquantaine de chasseurs-bombardiers des missions d'attaque au sol le 4 avril, ont répondu qu'"ils continueront sur la même ligne, c'est-à-dire fournir des avions pour des interventions ponctuelles lorsque les moyens dont ils disposent sont particulièrement utiles", a expliqué Alain Juppé.
Rebondir après les atermoiements
Avant la réunion de Berlin, Paris et Londres avaient claironné leur intention de presser les alliés d'"intensifier" les raids aériens en fournissant plus d'avions pour les raids. Mais aucun pays européen n'a répondu à cette demande bien que six Etats membres de l'Otan seulement sur un total de 28 autorisent leurs avions à effectuer des frappes air-sol. "Nous allons faire tout ce qu'il faut pour protéger les civils, et pas seulement en parole mais aussi en actions", a indiqué Anders Fogh Rasmussen, en soulignant que l'Otan avait déjà effectué 2.000 missions depuis qu'elle avait pris en main les opérations le 31 mars.
Les chefs de la diplomatie ont adopté une déclaration en trois points, qui devront être satisfaits avant qu'il puisse être question d'un cessez-le-feu : toutes les attaques contre les civils doivent cesser. Les militaires doivent retourner dans leurs casernes et se retirer de toutes les villes où elles sont déployées ou qu'elles assiègent, telles Ajdabiya, Brega, Misrata et neuf autres dans l'ouest comme dans l'est du pays. Enfin, une aide humanitaire doit pouvoir être fournie en toute sécurité à tous ceux qui en auraient besoin.
Sur le terrain, des avions ont survolé jeudi la capitale libyenne Tripoli, où de fortes explosions ont été entendues, suivies de tirs de défense anti-aérienne. Lors d'un raid de la coalition, Mouammar Kadhafi a effectué une sortie dans les rues de Tripoli. Lunettes noires et chapeau, à moitié sorti de sa voiture par le toit ouvrant, il a salué les passants en levant les poings, selon les images diffusées par la télévision. A Ajdabiya, dans l'Est du pays, un violent échange de tirs a lieu entre les forces fidèles à Kadhafi et des rebelles, tandis que 13 personnes ont été tuées dans une offensive des pro-Kadhafi sur Misrata, selon la rébellion.