En annonçant vendredi en début d’après-midi un cessez-le-feu immédiat, en conformité avec la résolution de l’ONU adoptée la veille au soir, Mouammar Kadhafi et les autres dirigeants libyens comptaient sans doute altérer la détermination de la communauté internationale. Mais si cette annonce va peut-être retarder l’échéance d’une intervention militaire, elle a suscité davantage de scepticisme que d’enthousiasme.
"Nous le jugerons à ses actes (Kadhafi) et non à ses paroles", a très rapidement prévenu David Cameron, le Premier ministre britannique, dans une interview à la BBC. "Ce qui est absolument évident, c'est que la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU dit qu'il doit arrêter de faire ce qu'il fait, c'est-à-dire de brutaliser son peuple. Sinon, toutes les mesures nécessaires peuvent être prises pour l'arrêter", a-t-il déclaré, histoire de rappeler qu’une intervention militaire restait d’actualité.
"Ne pas nous laisser impressionner par des mots"
Les Etats-Unis sont allés plus loin. "L’objectif final" reste le départ du dictateur libyen, a lancé Hillary Clinton, la secrétaire d’Etat américaine, en assurant que Washington continuerait à travailler avec ses partenaires "pour convaincre M. Kadhafi de quitter le pouvoir et soutenir les aspirations légitimes des Libyens. Nous n'allons pas nous laisser impressionner par des mots. Il nous faut voir des actes sur le terrain", a affirmé l’ex-première dame des Etats-Unis.
Et même l’Allemagne, ouvertement hostile à une intervention militaire, "par peur de victimes civiles", selon son chef de la diplomatie Guido Westerwelle, attend de voir. "Il y a déjà des nouvelles encourageantes selon lesquelles Kadhafi réagit à la résolution. Le monde et la communauté internationale devront s'assurer qu'il ne s'agit pas de manœuvres dilatoires ou de ruses", a déclaré Angela Merkel dans un point presse. La chancelière allemande en a profité pour expliciter sa position. Si le pays s’est abstenu de voter la résolution onusienne, "c'est parce que, et j'insiste en disant uniquement parce que" l'Allemagne ne veut pas participer aux opérations militaires. "Nous partageons sans réserve les objectifs de la résolution, et notre abstention ne doit pas être confondue avec de la neutralité", a-t-elle lancé.
Des explosions entendues à Tripoli
Finalement, la réaction la plus prudente est venue de l’Union européenne. "Du point de vue militaire, la question décisive sera pour les planificateurs militaires de décider ce qui devrait être fait, l'enjeu étant bien sûr (de savoir) quelle est la signification de la déclaration sur le cessez-le-feu et la façon dont elle s'imbrique" dans la situation générale, a estimé Catherine Ashton, chef de la diplomatie de l’UE.
Sur le terrain, difficile de savoir pour l’heure si les opérations militaires des pro-Kadhafi ont cessé, comme promis. Depuis l’annonce, de fortes explosions sporadiques et lointaines ont été entendues depuis le centre de Tripoli. Des témoins et journalistes présents dans la capitale libyenne ont également entendu le bruit d'une série de six à huit détonations. Sans que l’on connaisse leur provenance.
La Libye dément les opérations militaires
De leur côté, les autorités libyennes ont démenti avoir mené des opérations militaires après l'annonce vendredi d'un cessez-le-feu, contrairement aux accusations de la rébellion. Vendredi soir, le numéro 2 de la dilplomatie a même assuré que l'armée libyenne d'entrerait pas dans Benghazi, pour se conformer au cessez-le-feu.
Des promesses qui interviennent à la veille d'un sommet tripartite sur la Libye, qui se tiendra à Paris.