C'est un scrutin historique. Les Libyens élisaient samedi leur première Assemblée nationale après des dizaines d'années de dictature sous Mouammar Kadhafi. Cette journée a été marquée par une attaque meurtrière et des opérations de sabotage de militants autonomistes dans l'Est.
Huit mois après la fin du conflit armé qui a provoqué la chute puis la mort de Mouammar Kadhafi, quelque 2,8 millions d'électeurs étaient appelés à choisir les 200 membres du "Congrès national général", où les islamistes espèrent remporter le même succès que leurs voisins tunisiens et égyptiens.
Un mort à Ajdabiya
La journée a néanmoins été endeuillée par la mort d'une personne à Ajdabiya, dans l'est du pays, lorsque des inconnus ont ouvert le feu près d'un bureau de vote, selon un responsable qui a fait également état d'un blessé.
Le chef de la Commission électorale, Nouri al-Abbar, a affirmé que 1,2 million de personnes avaient voté à 16 heures (14 heures GMT), soit environ 40% du corps électoral, disant s'attendre à "une affluence beaucoup plus importante" avant la fermeture des bureaux. Les bureaux ont commencé à fermer à 20 heures (18 heures GMT) à Tripoli et Benghazi (est), foyer de la révolution.
Le chef de la Commission a précisé que "dans certains bureaux de vote qui ont été fermés une partie de la journée dans l'Est, l'opération électorale se poursuivrait jusqu'à ce que tous les électeurs le souhaitant aient pu voter". Il a indiqué en fin d'après-midi que 98% des bureaux de vote fonctionnaient normalement, alors qu'il avait annoncé plus tôt qu'une centaine de bureaux, sur un total de 1.554, soit 94%, n'avaient pu ouvrir leurs portes en raison d'actes de sabotages, notamment dans l'Est. Le vice-ministre de l'Intérieur Omar al-Khadhraoui a assuré en début de soirée que les autorités maîtrisaient désormais la situation dans cette région.
Des résultats "à partir de lundi ou mardi"
Les résultats préliminaires devraient être annoncés "à partir de lundi ou mardi", selon la Commission. A Tripoli comme à Benghazi, les bureaux de vote ont vu passer un flot d'électeurs ravis de participer au premier scrutin national après plus de quarante ans de règne de Mouammar Kadhafi.
"Ma joie est indescriptible. C'est un jour historique", a déclaré Fawziya Omran, 40 ans, en patientant devant une école du centre de la capitale. "Je me sens un citoyen libre", s'est réjoui de son côté, Ali Abdallah Derwich, 80 ans, en chaise roulante.
Certains électeurs étaient venus avec les drapeaux noir, rouge et vert de la révolution, et les mosquées diffusaient les "Allah Akbar" (Dieu est le plus grand) tandis que les rues résonnaient des concerts de klaxons.
Nouvelle période de transition
En votant dans sa ville de Baïda (est), Moustapha Abdeljalil, le président du Conseil national de transition (CNT au pouvoir) qui doit s'effacer devant la nouvelle Assemblée, a estimé que cette journée établissait "les fondements d'une Libye nouvelle".
Avec 3.702 candidats et plus de 100 partis en lice, les pronostics sont difficiles, mais trois formations sortent du lot : les islamistes du Parti de la justice et de la construction (PJC), issu des Frères musulmans, ceux d'Al-Watan, dirigés par l'ex-chef militaire controversé de Tripoli Abdelhakim Belhaj, et les libéraux réunis dans une coalition lancée par l'ex-Premier ministre du CNT Mahmoud Jibril.