Quel est l’objectif de l’opération "Barkhane" ? Jean-Yves Le Drian l’a annoncé dimanche au micro d’Europe 1, l’opération "Serval", lancée de toute urgence en janvier 2013, est désormais terminée. L’opération est un "succès" selon le ministre de la Défense: "Il fallait que le Mali retrouve son intégrité, c’est fait", a-t-il déclaré dimanche. Place désormais à "Barkhane", dont l’objectif est plus ambitieux : "Il y a toujours des risques terroristes majeurs dans la zone qui va de la corne d’Afrique à la Guinée Bissau, dans le nord de pays comme le Mali, le Tchad, le Niger. (…) L’objectif est essentiellement (…) d’empêcher que ce que j’appelle "l’autoroute de tous les trafics" ne devienne un lieu de passage permanent des groupes jihadistes de la Libye à la façade Atlantique", a expliqué le ministre. Selon les informations du Parisien, l'opération devrait être lancée mardi, à l'occasion de la tournée du président de la République au tchad, en Côte d'Ivoire et au Niger.
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Pourquoi ce choix de nom ? Barkhane désigne les dunes en croissant allongé, formées par le vent qui fait rouler les grains de sable. Une référence au désert, futur théâtre de "Barkhane" et déjà objet l’opération "Sabre". Didier François, spécialiste des questions de défense à Europe 1, explique que l’opération "Sabre" est une forme d’introduction à "Barkhane". Elle mobilise un contingent de soldats plus réduit, membres des forces spéciales françaises, chargés de déstabiliser l’organisation de Mokhtar Belmokhtar, un cadre d’Aqmi dont la tête est mise à prix cinq millions de dollars par la CIA. Et pour le moment, "Sabre" est une réussite puisque grâce à des actions discrètes et ponctuelles, huit des plus proches lieutenants de Mokhtar Belmokhtar ont été tués depuis son lancement. Bien avancée, "Sabre" permet maintenant à l’Armée de se lancer dans une nouvelle étape de plus grande ampleur avec "Barkhane".
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Quels moyens vont être mobilisés ? Pour détruire les katibas jihadistes (les factions disséminées dans la bande sahélo-saharienne) implantées notamment dans le massif des Ifoghas, l’armée française va redéployer 3.000 hommes mobilisés dans le cadre de "Serval". Ils bénéficieront d’un appui aérien, de drones de repérage et aideront les forces spéciales déjà sur la piste des camps terroristes. Cette opération de plus grande ampleur sera menée en coopération avec les armées de cinq Etats africains concernés.
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Quelles seront les difficultés pour mener "Barkhane" à bien ? Les katibas implantés dans le nord du Mali et plus généralement dans la région sont composées de petites factions de jihadistes, extrêmement mobiles donc difficiles à tracer. De plus, bien qu’ils se trouvent en plein désert, leurs membres disposent de technologies de communication de pointe. Outre les groupes jihadistes (Aqmi, mais aussi Mujao, Ansar Dine…), la région est aussi habitée par des populations touaregs, dont certains sont organisés en groupe armés indépendantistes comme le MNLA (Mouvement National pour la Libération de l’Azawad, du nom de la zone nord-malienne). Pour couronner le tout, l’Azawad est également un lieu de prédilection pour les commerçants et trafiquants de tout poil, qui ont eux-mêmes tissé des relations avec les groupes terroristes. De quoi compliquer un peu plus la donne pour les militaires dépêchés sur le terrain.
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