3'CHRONO- Les djihadistes renoncent à appliquer la charia mais une opération militaire est imminente.
• Le contexte. Rebelles touaregs et militants islamistes ont profité du chaos qui a suivi le coup d'Etat militaire du 22 mars à Bamako contre le président Amadou Toumani Touré pour prendre le contrôle du nord du pays. Après avoir joint leurs forces aux rebelles touaregs, les islamistes d'Ansar Dine et d'autres groupes djihadistes ont réussi à évincer le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), la rébellion touareg, laïque et favorable à l'autodétermination.
Jusqu'ici, Ansar Dine appliquait la "charia", la loi islamique dans tout le pays, commettant de nombreuses exactions sur les civils et des destructions de mausolées. Mais le groupe islamiste a annoncé mercredi qu'il renonçait à ce principe, sauf à Kidal, son fief du nord-est. Des déclarations qui interviennent au moment où la pression redouble sur les djihadistes.
• 3.300 hommes déployés… Plusieurs dirigeants ouest-africains n'hésitent plus à parler d'opération militaire "imminente". Les dirigeants de la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) ont approuvé dimanche l'envoi d'une force militaire de 3.300 soldats pour une durée d'un an. L'Union africaine (UA) a également validé cette décision. Deux ou trois autres pays africains pourraient également contribuer à cette force.
…mais un passage par l'ONU nécessaire. Le plan doit être transmis avant la fin novembre au Conseil de sécurité de l'ONU qui doit donner son feu vert pour une intervention armée. Pour cela, les pays africains vont invoquer le chapitre VII de la Charte de l'ONU, qui autorise l'emploi de moyens militaires.
• La stratégie militaire des pays africains... "Les Etats sont prêts à envoyer leur contingent", affirme Mahamadou Issoufou, le président nigérien. Selon lui, le Nigeria, le Niger (500 hommes), le Burkina Faso, le Sénégal, le Togo sont prêts à intervenir. Un constat partagé par le président de la Commission de la Cédéao, Kadré Désiré Ouedraogo : l'armée malienne "peut être rapidement en mesure de combattre". Une intervention "par phases" est pour l'instant privilégiée plutôt qu'un déploiement de "toute la force en même temps", précise-t-il. Des opérations spéciales sont également envisagées. Mais des craintes subsistent au sein de plusieurs Etats-majors car les forces djihadistes sont estimées à environ 6.000 hommes.
Puissance régionale incontournable mais réticente à une intervention internationale à ses portes, l'Algérie, pays frontalier, a promis qu'elle "fermerait ses frontières" en cas d'opération. L'idée est de priver les groupes armés de toute base arrière en cas d'attaque.
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…et le soutien logistique de la France. François Hollande l'a répété lors de la conférence de presse : la France exclut une intervention miliaire au sol et elle écarte, pour l'instant, l'éventualité de frappes aériennes. Néanmoins, Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, envisage d'apporter "du renseignement" aux forces africaines. Jeudi, les ministres concernés de cinq pays européens (France, Allemagne, Pologne, Espagne, Italie) discuteront à Paris d'une mission européenne d'entraînement des forces africaines, qui pourrait mobiliser 200 militaires, encadrés par des "éléments de protection".
• Une option diplomatique pas écartée. L'option préférée par tous est celle du "dialogue", selon la Cédéao. Parallèlement à la constitution d'une force militaire, une activité diplomatique s'organise. L'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU pour le Sahel, Romano Prodi va appeler à une réunion internationale à Rome en décembre pour résoudre la crise. L'ancien Premier ministre italien essaye également de mettre en place une aide humanitaire pour la région du Sahel. "Il faut du temps pour préparer une opération militaire", a souligné Romano Prodi, qui espère mettre ce délai à profit pour travailler à une solution diplomatique.