Michelle Martin est indésirable à Malonne, petite ville de 5.000 habitants du sud de la Belgique. Quelques centaines de personnes sont venues le crier haut et fort vendredi matin. Elles entendaient ainsi protester d’une part contre la libération conditionnelle accordée à l’ex-femme de Marc Dutroux, d’autre part contre l’annonce de son arrivée au monastère des soeurs clarisses. Les manifestants portaient des ballons blancs, en hommage aux enfants victimes du couple, ou noirs, pour dénoncer la décision prise mardi par le Tribunal d'application des peines (TAP) de Mons.
"Honte à qui? A la justice!"
Arrivé à proximité du couvent, situé sur les hauteurs du village, des sifflets et des cris ont fusé : "Honteux, honteux! En prison, en prison!" "Honte à qui ? A la justice !". Puis a eu lieu le traditionnel lâcher des ballons, sous les applaudissements. "Cette libération, ça nous touche beaucoup. Il faut se mettre à la place des parents et penser au calvaire que les fillettes ont subi", a expliqué Albert Ponassi, un sexagénaire proche de la famille d'une des victimes. Quelques manifestants se sont attardés plus d'une heure en contrebas du monastère, dont le portail est barré d'un grand "Non" tagué cette semaine par des inconnus.
Michelle Martin, une ancienne institutrice âgée aujourd'hui de 52 ans, avait été reconnue coupable d'avoir séquestré plusieurs des jeunes victimes de Marc Dutroux et d'avoir laissé mourir de faim Julie Lejeune et Melissa Russo, âgées de huit ans, emmurées dans un cachot. Dutroux a été condamné à la perpétuité. Incarcérée depuis son arrestation en 1996, Michelle Martin a purgé 16 ans de prison, soit un peu plus de la moitié des 30 ans de réclusion auxquels elle a été condamnée. "Cela fait huit ans par enfant, juste l'âge de Julie et Melissa", relevait avec amertume dans le cortège une habitante de Malonne.
"Elle est capable de recommencer"
Si Michelle Martin devrait mener une vie "discrète" au sein du monastère, selon son avocat, rien ne l'empêchera légalement d'en sortir, une perspective redoutée par les habitants du petit village, qui compte plusieurs écoles et crèches. "Si elle rencontre à nouveau un pervers comme Dutroux, elle est capable de recommencer", assure une retraitée venue en voisine, Jacqueline Nef. "Elle avait mille et une occasions de sortir les filles" de la cave, "mais elle ne l'a pas fait, et maintenant c'est elle qu'on libère", dénonce-t-elle.
La libération de Michelle Martin n’est cependant pas totalement acquise. Dès mardi, le parquet général de Mons avait introduit un pourvoi en cassation contre la décision de remise en liberté. La plus haute juridiction du pays doit se prononcer avant la fin du mois, mais uniquement sur des questions de procédure. En attendant, l'ex-femme de Marc Dutroux reste derrière les barreaux.