Après le nouveau naufrage en Méditerranée, qui pourrait avoir fait 700 morts, l'incurie de l'Union européenne est pointée du doigt. Que fait-elle et comment pourrait-elle mieux intervenir ?
Selon les mots du Premier ministre espagnol, il en va de la "crédibilité" de l'Europe. Après un nouveau naufrage d'un bateau de migrants en Méditerranée, qui aurait fait près de 700 morts, les regards sont braqués sur l'Union européenne, accusée d'incurie par certains. La tenue d'un sommet extraordinaire est prévue lundi après-midi, comme le demande notamment Matteo Renzi, le chef du gouvernement italien, dont le pays est en première ligne pour faire face à la situation. Que fait actuellement l'Union européenne sur le dossier et comment pourrait-elle mieux intervenir ? Eléments de réponse.
Quelles sont les règles européennes ? A l'heure actuelle, l'Europe ne fait pas grand-chose, puisqu'en droit européen, la solidarité n'est pas obligatoire. Même si l'Italie est submergée par l'afflux de migrants, rien ne contraint ses voisins à l'aider. Au sein de l'espace Schengen, chaque pays gère seul sa frontière, et donc les demandeurs d'asile qui arrivent sur son territoire et aucun mécanisme n'est prévu pour les répartir à l'échelle européenne. D'autant plus que certains pays, au nord et à l'est de l'Europe, font la sourde oreille, considérant qu'ils ont leurs propres problèmes.
Quels sont les dispositifs existants ? Il existe cependant une opération européenne de patrouille en mer, baptisée "Triton". Elle a été lancée par Frontex, l'agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l'union européenne. "Triton" a été lancée en novembre 2014 pour remplacer l'opération "Mare nostrum", une opération de secours dont l'Italie était chargée, rappelle Le Monde. Mais "Mare nostrum", qui mobilisait une dizaine de navire et quelque 900 hommes, était critiquée pour son coût élevé. En Italie, certains l'ont aussi accusée d'inciter les passeurs à envoyer plus de migrants vers l'Europe, puisque les traversées étaient plus sûres. L'opération "Triton", elle, est beaucoup plus modeste, avec un budget de moins de 3 millions d'euros et seulement quelques navires mobilisés.
L'UE va-t-elle changer sa politique ? Dimanche, la Commission européenne, qui prépare une nouvelle stratégie sur l'immigration qui doit être adoptée mi-mai, a souligné que "des vies humaines sont en jeu, et l'Union européenne dans son ensemble a l'obligation morale et humanitaire d'agir". Un sommet extraordinaire pourrait avoir lieu prochainement et, lundi, les ministres des Affaires étrangères de l'UE doivent se rencontrer à Luxembourg. A cette occasion, Federica Mogherini, chef de la diplomatie européenne, entend "présenter une série de propositions concernant la Libye, une des principales routes du trafic illégal de migrants". Les chefs de la diplomatie des 28 doivent notamment discuter de l'assistance éventuelle de l'UE à un gouvernement d'unité nationale actuellement en pourparlers en Libye, où les passeurs profitent du chaos ambiant.
Des associations, ainsi que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) réclament de leur côté la mise en place d'un système de sauvetage similaire à "Mare nostrum". En attendant, il y a urgence : chaque jour, entre 500 et 1.000 personnes sont récupérées par les gardes-côtes italiens ou des navires marchands. Et depuis le début de l'année, sans compter la tragédie survenue dimanche, plus de 900 migrants ont déjà perdu la vie en tentant la traversée vers les côtes de l'Europe.
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