En période de crise, tous les moyens sont-ils bons pour donner du travail au plus grand nombre ? C'est la question qui divise actuellement la chocolaterie italienne Perugina de Ponte San Sisto, près de Pérouse, détenue par Nestlé. Alors que l'Italie est frappée de plein fouet par le chômage (qui dépasse désormais les 10%), la direction de l'entreprise vient de proposer à ses salariés de plus de 50 ans le marché suivant : travailler moins et gagner moins afin de permettre à leurs enfants d'obtenir un emploi dans la même entreprise. Une offre surprenante qui fait débat de l'autre côté des Alpes, où chez les 15/24 ans, près d'un jeune sur trois n'a pas de travail.
Nestlé invoque la réforme des retraites
Le mécanisme est le suivant : la direction propose à ses employés de travailler 30 heures par semaine au lieu de 40, pour un salaire réduit de 20%. Le tout sur la base du volontariat. En échange, le jeune en question peut obtenir un CDI de 30 heures.
Pour Nestlé Italie, sa proposition se justifie d'autant plus que le gouvernement Monti a repoussé l'âge de départ à la retraite à 67 ans. Une réforme qui, souligne la multinationale, freine la sortie du marché du travail des plus âgés et restreint de fait l'accès à l'emploi des jeunes générations.
Les dirigeants italiens de Nestlé sont tellement emballés par leur idée qu'ils envisagent de l'appliquer à d'autres sites. "Il y a chez les salariés des gens qui rêvaient de raccrocher à 55 ans et au lieu de cela, ils doivent attendre une dizaine d'années. A eux aussi nous tenons le même discours que celui que nous avons tenu à ceux de Pérouse", explique Gianluigi Toia, directeur des relations industrielles de l'entreprise dans les colonnes de La Repubblica.
"Deux pauvres au lieu d'un"
Faire rentrer dans chaque foyer un salaire et demi au lieu d'un seul, certains salariés sont pour. "Mon fils a 29 ans et il ne trouve aucun boulot (…). Avec la proposition de Nestlé, j'aurai moins d'argent mais aussi moins d'heures de travail et lui aura au final un salaire aussi bas soit il et aussi de quoi cotiser", se réjouit d'avance un employé dans le quotidien italien.
Mais les syndicats, eux, ne décolèrent pas contre l'entreprise, estimant que "seul un désespéré peut accepter une telle chose". Pour Sara Palazzoli, syndicaliste de la CGIL, la multinationale ne va créer aucune richesse avec cette formule. Au contraire. Nestlé va "faire deux pauvres au lieu d'un", prévient-elle.
Estimant que cette proposition ne vise qu'à masquer le manque de politique d'innovation et d'investissement du groupe ces dernières années, les syndicats exigent tout simplement l'abandon du projet.