Même libérés de leurs ravisseurs, les 700 femmes et enfants sauvés de Boko Haram par l'armée nigériane depuis une semaine restent prisonniers. Prisonniers du souvenir traumatisant de cette captivité, qui a duré, selon les cas, de quelques jours à un an. Profondément marqués, physiquement aussi, par les difficiles conditions de détention. Dans le camp de déplacés de Yola, où 275 ex-détenus ont été installés, une cellule de soutien post-traumatique a été mise en place. Les médecins ont également constaté une sous-alimentation généralisée chez ces femmes et enfants.
Quelques grains de maïs pour manger. Asabe Umaru, une mère de 24 ans, explique qu'en guise de nourriture, son groupe de prisonniers n'avait droit qu'à une poignée de grains de maïs en fin de journée, rapporte Atlantico. "Dix d'entres nous sont mortes avant même d'arriver au camp", explique-t-elle. Pour les autres, la survie est difficile, à tel point qu'une vingtaine de prisonniers ont été hospitalisés une fois libérés. Mal nourris, mais aussi maltraités, les prisonniers de Boko Haram font l'objet d'une étroite surveillance : "on ne pouvait pas aller se soulager seules, on était constamment encadrés", raconte-t-elle.
Le mariage forcé ou l'esclavage. Binta Abdullahi, 18 ans, avait été enlevée dans son village près de Madagali, dans le nord de l'Etat d'Adamawa, il y a plus d'un an, avant d'être déplacée à Gwoza, une ville du nord-est du Nigeria dont l'organisation terroriste a fait son quartier général. Elle raconte les mariages forcés, les pressions psychologiques et les sévices sexuels dont elle et ses compagnons d'infortune ont pu être victimes. L'alternative posée est aussi simple que brutale : les femmes doivent accepter un mariage forcé avec un combattant de Boko Haram sous peine d'être vendues comme esclaves.
Des mines disséminées autour des places fortes de Boko Haram. La libération de ces femmes et enfants n'a pas non plus été sans mal : "Quand les militaires ont donné l'assaut au camp où nous étions détenus, nos ravisseurs nous ont dit de nous réfugier sous les arbres et buissons pour échapper aux bombardements de l'armée. Des femmes qui s'étaient cachées sous les arbres ont été écrasées par des chars qui avançaient sans savoir qu'elles étaient là", raconte la jeune femme. Au moment de quitter les lieux avec l'armée, "trois femmes au moins et des soldats ont été tués dans l'explosion d'une mine", conclut-elle.
Travail psychologique. Face à de tels traumatismes, l'Agence nationale de gestion des urgences (NEMA) nigériane doit beaucoup travailler sur la psychologie : "Certaines des victimes montrent vraiment des signes de traumatisme et nous tentons de leur faire réaliser que ce n'est pas la fin de leur vie", explique Sa'ad Bello, l'un des cadres de la NEMA. Et le travail est loin d'être terminé. Selon les ONG présentes sur place, Boko Haram aurait kidnappé 2.000 personnes au Nigeria.
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