Le Japon s’est d’ores et déjà résigné à un long combat pour contenir le plus dangereux des accidents nucléaires depuis Tchernobyl. Le niveau très élevé de la radioactivité complique en effet les efforts consentis à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, dans le Nord-Est du pays. Mais où en est-on sur place ?
Du plutonium détecté. A cinq endroits, dans le sol de la centrale, du plutonium 238, 239 et 240 a été détecté. Les taux relevés seraient équivalents à ceux détectés au Japon après des essais nucléaires effectués dans des pays voisins, assure la société Tokyo Electric Power, qui écarte tous dangers pour la santé. Pourtant, le plutonium, "c’est encore plus dangereux que les autres radioéléments", décrypte Brigitte Béjean, journaliste spécialiste de l'environnement à Europe 1.
D'où vient ce plutonium ? Le réacteur 3, dont le toit du bâtiment a été soufflé par une explosion, est le seul à contenir du MOX, mélange d'oxydes de plutonium et uranium, dont les rejets radioactifs sont parfois considérés comme plus dangereux.
Le réacteur n°2, cœur du danger. L’inquiétude se cristallise au niveau du réacteur n°2. Vendredi, les ouvriers qui s’activent sur le site ont découvert une nappe d’eau radioactive dans le sous-sol de la salle des machines de ce réacteur, certainement due à des cartouches de combustible qui ont temporairement fondu et sont entrés en contact avec l'eau qui sert à refroidir le réacteur. Les dernières mesures, effectuées dimanche, montraient que la radioactivité y était 100.000 fois supérieure à la normale.
Mais lundi, de l'eau fortement radioactive a également été découverte à l'extérieur du bâtiment abritant le réacteur. Une eau qui pourrait avoir ruisselé jusqu'à la mer toute proche.
Le personnel de Tokyo Electric Power (Tepco), exploitant de la centrale, tente de pomper cette eau, afin de pouvoir reprendre les opérations visant à relancer le système de refroidissement du réacteur.
Reprendre le contrôle des réacteurs. Dans ces conditions, l’objectif des "liquidateurs" est de reprendre le contrôle des six réacteurs de la centrale nippone. Pour le moment, La situation est considérée comme stabilisée dans deux des six réacteurs, mais elle demeure instable dans les quatre autres, d'où se dégage parfois de la vapeur ou de la fumée.
Les réacteurs 5 et 6 ont un système de refroidissement alimenté en électricité, et en fonctionnement. Les autres réacteurs ont, eux, pu être partiellement raccordés au réseau électrique. Alors que des opérations de pompage sont possibles dans les réacteurs 1 et 4, elles ne sont pas envisageables dans les numéros 2 et 3 en raison d’un taux de radioactivité trop important.
Au-delà du pompage, quelque 500 techniciens, pompiers et militaires continuent à injecter de l'eau douce à l'aide de pompes électriques dans les réacteurs afin d'empêcher le combustible de chauffer, ce qui provoquerait une catastrophe de grande ampleur. Des opérations d'urgence réalisées via des canons à eau et des grues géantes, et qui utilisent de l'eau de mer pompée dans l'océan Pacifique. Or, l'accumulation de sel risque d'entrainer une corrosion des installations.
Une aide extérieure. Face aux difficultés rencontrées par le Japon, Tepco a demandé lundi l’aide de ses consoeurs françaises EDF et Areva pour stabiliser l'état des réacteurs.
Un "appui" dont s’est réjoui Eric Besson, sur RTL. Le ministre français de l'Industrie a précisé qu’"on a du mal à savoir quelle est très exactement la situation", avant d’ajouter : "quand il y aura le retour d'expérience" des groupes français, "on en saura plus".
Par ailleurs, certains appellent à une aide de l’ONU. "Je pense que peut-être, la situation est nettement plus grave que nous ne le pensions", a déclaré un expert, Najmedin Meshkati, de l'université de Californie Sud. "Cela va bien au-delà de ce qu'un pays peut gérer, cela doit être évoqué par le Conseil de sécurité de l'ONU. A mon humble avis, c'est plus important que la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye", a-t-il estimé.
La pollution s’étend. Autour de Fukushima, la radioactivité a augmenté ces derniers jours. Un niveau d'iode 131 1.850 fois supérieur à la normale a ainsi été relevé en mer au large de la centrale. Il s'agit du niveau les plus alarmants mesurés depuis le début de la catastrophe, il y a maintenant 17 jours.
Les conséquences de la catastrophe nucléaire ne sont pas seulement visibles près de Fukushima. De la radioactivité a notamment été mesurée dans l'eau courante à Tokyo. Le ministère japonais de la Santé a d’ailleurs demandé aux usines de distribution d'eau sur tout le territoire de cesser de recueillir l'eau de pluie, afin d'éviter d'éventuelles contaminations par les rejets radioactifs de la centrale de Fukushima.
De l'iode radioactif a même été décelé dans de l'eau de pluie dans l'Etat du Massachusetts, sur la côte Est des Etats-Unis, mais les autorités sanitaires assurent que cela n'est en rien dangereux.