La France accélère le jeu diplomatique avec la Libye. Reçu jeudi matin à l'Elysée via trois émissaires, le Conseil national de transition (CNT) libyen, qui regroupe l'opposition au régime du colonel Mouammar Kadhafi, a été reconnu comme le seul "représentant légitime du peuple libyen".
Premier Etat à reconnaître le gouvernement parallèle libyen, la France enverra d'ici peu un ambassadeur à Benghazi, chef-lieu de l'opposition au colonel Kadhafi en Libye. Après cet entretien qui a duré plus d'une heure, Nicolas Sarkozy a raccompagné les trois émissaires sur le perron de l'Elysée et des poignées de main appuyées ont été échangées.
En Libye, du côté de l'opposition, cette reconnaissance a été vivement saluée. A Benghazi, sur la place du Palais de justice, "c'est une joie immense" qui a accueilli cette annonce, rapporte l'envoyé spécial d'Europe 1, alors que des banderoles avaient déjà été déployées sur la place ces derniers jours pour saluer l'attitude de la France dans la crise libyenne.
Des frappes aériennes ciblées
Cette reconnaissance intervient à la veille d'un sommet européen extraordinaire consacré à la crise libyenne où les pays européens apparaissent divisés sur Mouammar Kadhafi et sur l'opportunité d'une intervention pour instaurer une zone d'exclusion militaire.Selon plusieurs sources proches du dossier, la France devrait proposer vendredi à l'UE un plan d'action comportant des frappes aériennes ciblées en Libye.
Mercredi, les députés européens ont pressé l'Union européenne de reconnaître le Conseil national de transition, dont la France avait salué la création en début de semaine, comme le représentant légitime du peuple libyen. Mais les députés n'ont pas reçu le soutien de la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton. Et parmi les diplomates à Bruxelles, l'enthousiasme vis-à-vis de l'opposition libyenne semble mitigé.
"Kadhafi s'est discrédité"
Les ministres des Affaires étrangères de l'UE, puis les ministres de la Défense de l'Otan se retrouvent d'ailleurs dès jeudi à Bruxelles, avant le sommet extraordinaire de vendredi, pour tenter de trouver une difficile position commune sur la Libye. La France a d'ailleurs appelé jeudi l'Union européenne à engager le dialogue avec "les nouveaux responsables libyens". "Nous sommes en phase avec (le ministre allemand des Affaires étrangères) Guido Westerwelle pour dire que Kadhafi s'est discrédité, qu'il doit partir", a déclaré Alain Juppé, le chef de la diplomatie française avant la réunion des ministres européens des Affaires étrangères.
La Libye veut rompre ses relations avec la France
La Libye a annoncé jeudi qu'elle envisageait de rompre ses relations diplomatiques avec la France "en raison des informations qui circulent sur la dangereuse ingérence (de Paris) dans les affaires libyennes". "Un Etat comme la France ne peut pas commettre cette stupidité et reconnaître des personnes qui ne représentent qu'elles-mêmes", a lancé un responsable du ministère des Affaires étrangères.
Le régime libyen a affirmé jeudi, via son agence officielle, que la révélation d'un "grave secret" allait entraîner la chute du président français Nicolas Sarkozy. L'agence officielle libyenne Jana a annoncé avoir "appris qu'un grave secret va entraîner la chute de Sarkozy, voire son jugement en lien avec le financement de sa campagne électorale".