A chaque rassemblement, ils semblent un peu plus nombreux. En Allemagne, le mouvement anti-islam et anti-réfugiés Pegida, lancé à l’automne, séduit une partie de la population mais suscite aussi une opposition farouche. De la chancelière Angela Merkel aux anonymes de la société civile, des Allemands ont lancé la riposte contre ce qu’ils considèrent comme un mouvement populiste et dangereux.
Pegida, c’est quoi ? Tout a commencé à la mi-octobre, quand Lutz Bachmann, un habitant de Dresde, au casier judiciaire conséquent, lance un groupe sur Facebook et appelle à une marche "contre l’islamisation". Le nom de son mouvement, Pegida, signifie "Européens patriotes contre l’islamisation de l’Occident". Son credo : le refus de l’islamisation ou des étrangers qui refuseraient de s’intégrer. Lors de la première manifestation, ils n’étaient que quelques centaines dans les rues de Dresde. Peu avant Noël, ils étaient 17.500, et Pegida s’est propagé à d’autres villes d’Allemagne, comme Munich, Düsseldorf ou encore Rostock.
Comment agissent-ils ? A Dresde et ailleurs, Pegida organise des "manifestations du lundi". Un mode d’action qui rappelle celui des manifestants contre le régime communiste du temps de la RDA. Les protestataires n’hésitent d’ailleurs pas à reprendre leur célèbre slogan, "Nous sommes le peuple".
Qu’en pensent les Allemands ? D’après un sondage de l’institut Forsa pour le journal Stern, rendu public le 1er janvier, 13% des Allemands se disent prêts à participer à une manifestation contre les musulmans. Ils sont aussi 29% à juger que l’influence de l’islam en Allemagne est tellement importante que ces marches sont justifiées. Mais les deux-tiers des sondés estiment toutefois exagérée l’idée d’une "islamisation" du pays, devenu la principale destination d’immigration en Europe.
Qui proteste contre Pegida ? Dans son discours de Noël, Joachim Gauck, le très respecté président allemand, a fait allusion à Pegida, sans nommer le mouvement, en expliquant que le fait de voir que "la plupart d’entre nous ne suivent pas ceux qui veulent isoler l’Allemagne" avait été pour lui "une expérience vraiment encourageante". Plus directe, la chancelière Angela Merkel a asséné qu’il n’y avait pas de place dans le pays "pour l’incitation à la haine et la calomnie". Son ministre de la Justice, le social-démocrate Heiko Mass, a de son côté considéré que c’était "une honte pour l’Allemagne que les manifestations [anti-islam] se tiennent aux dépens des réfugiés qui ont justement tout perdu et nous demandent de l’aide". En dehors de la classe politique, les réactions se multiplient aussi et plusieurs contre-manifestations ont été organisées, dont certaines ont rassemblé plus de monde que les rassemblements de Pegida.
>> LIRE AUSSI - L'Allemagne découvre ses "nipsters"