Très engagées, les trois jeunes femmes jugées à Moscou ont suscité une vague mondiale de soutien.
Madonna, Sting, Yoko Ono, Paul McCartney plus récemment, mais aussi des milliers d’anonymes… En quelques mois, trois membres des Pussy Riot, groupe de punk-rock féministe russe, ont suscité une vague de sympathie dans le monde occidental. Ces jeunes femmes, âgées de 22 à 30 ans, sont jugées depuis fin juillet pour avoir chanté le 21 février, encagoulées, avec guitares et sonorisation, une "prière punk" anti-Poutine dans la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou.
Elles ont été reconnu coupable vendredi. Leur peine n'est pas encore connue, mais le procureur a requis pour ces faits d’"hooliganisme" et d'"incitation à la haine religieuse" pas moins de trois ans de prison, suscitant la colère des défenseurs de la liberté d’expression.
Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samoutsevitch, et Maria Alekhina étaient jusqu’alors quasiment inconnues du grand public, que ce soit en Russie ou dans le reste du monde. Les trois jeunes femmes n’ont pourtant pas ménagé leur peine depuis quelques années pour s’opposer à un pouvoir qu’elles jugent trop autoritaire. Portraits de trois femmes engagées.
Nadejda Tolokonnikova, 22 ans
A seulement 22 ans, Nadejda Tolokonnikova a déjà un solide bagage de militante derrière elle. Et une certaine habitude des coups d’éclat. En 2008, enceinte de neuf mois, elle avait posé nue dans une position suggestive avec son mari dans un musée de Moscou pour protester contre l'élection de Dmitri Medvedev à la présidence russe. Le couple avait baptisé sa performance "Naissance d'un ourson" ("Medved" veut dire "ours" en russe).
Jolie brune née dans le grand Nord russe, Nadejda Tolokonnikova ne manque ni de charisme ni d’admirateurs. Cette étudiante en philosophie, à la prestigieuse université d'Etat de Moscou, est également membre du groupe d'art contestataire Voïna (La guerre). Le mouvement s’était fait connaître en 2011 en dessinant un phallus géant en face des bureaux du Service fédéral de sécurité (FSB, ex-KGB) sur un pont de Saint-Pétersbourg, deuxième ville de Russie.
"J’aime les situations extrêmes", répète à l’envi cette maman d’une petite Héra, âgé de quatre ans. En la baptisant ainsi du nom de la femme de Zeus, la jeune femme espère que sa fille pourra "se défendre contre ses ennemis".
Maria Alekhina, 24 ans
C’est à travers l’écologie que Maria Alekhina est de son côté venue au militantisme politique. Cette jeune Moscovite de 24 ans s'est fait connaître à travers ses actions pour la défense du lac Baïkal, en Sibérie, ou contre l'abattage de la forêt de Khimki, dans la banlieue de Moscou, pour construire une autoroute à péage reliant la capitale russe à Saint-Pétersbourg.
Etudiante à la Haute école de journalisme et de littérature de Moscou, cette jeune femme mince aux cheveux châtain clair, père célibataire d’un petit Philippe, 5 ans, écrit des poèmes et travaille en tant que bénévole dans un hôpital psychiatrique pour enfants à Moscou.
Ekaterina Samoutsevitch, 30 ans
Ekaterina Samoutsevitch n’a quant à elle pas fêté son trentième anniversaire dans des conditions idéales, puisqu’elle était en détention préventive au moment de son anniversaire. La plus âgée des trois prévenues est diplômée de l'Institut de l'énergie de Moscou. Elle a d’ailleurs travaillé comme informaticienne dans une entreprise du secteur militaire, notamment à la mise au point de logiciels pour le sous-marin nucléaire Nerpa.
Mais son âme d’artiste rebelle a rattrapé la jeune femme, qui a démissionné en 2007 pour intégrer une école de photographie et de multimédias, qu’elle fréquentera jusqu’en 2009. Meilleure amie de Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samoutsevitch a participé à tous les coups d'éclat du groupe d’art Voïna depuis quelques années. Elle a ainsi jeté avec ses camarades des cancrelats dans les locaux d'un tribunal à Moscou en 2010 et embrassé des policières dans le métro de la capitale l'année suivante. La néo-trentenaire se définit comme une peintre faisant de l'art politique".