Mais que fait Mahmoud Abbas ? Depuis le début des frappes israéliennes sur la bande de Gaza, le président de l'Autorité palestinienne semble bien discret. Dans des manifestations de soutien à leurs concitoyens, des Palestiniens de Cisjordanie ont d'ailleurs pris à partie leur président : "Oh l'Autorité, dis-nous ce qui t'arrive".
Une contradiction dure à résoudre. Car théoriquement, Mahmoud Abbas est le président de tous les Palestiniens, ceux de Cisjordanie comme ceux de l'enclave de Gaza. Dans les faits, bien sûr, le chef de l'Autorité en a bien peu, d'autorité, sur les Palestiniens gazaouis, de facto gouvernés par le Hamas, comme l'expliquait très bien Le Monde. Mais il est pris entre deux feux : celui des Palestiniens de Cisjordanie indignés devant les frappes à Gaza, et celui d'Israël qui collabore avec l'Autorité palestinienne et ne veut pas entendre parler d'un soutien au Hamas.
En rouge, les zones sous contrôle palestinien, avec la bande de Gaza au Sud. En rouge hachuré, les zones où Israël partage le contrôle avec l'Autorité palestinienne.Le problème de Mahmoud Abbas, résume pour Europe1.fr Julien Salingue, chercheur en sciences politiques spécialiste de la question palestinienne, c'est que "l'OLP (l'Organisation de libération de la Palestine, coalition politique à la tête de l'Autorité palestinienne qui regroupe notamment le Fatah, ndlr.) est pris dans une contradiction qu'elle a du mal à résoudre".
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Abbas agace les Palestiniens. Mahmoud Abbas subit en effet les foudres de deux parties : d'un côté, les Palestiniens, dont des membres de son propre camp, le trouvent trop frileux. "Le peuple palestinien n'a pas ressenti durant cette guerre israélienne contre Gaza qu'il a un leader proche de lui et qui reflète ces aspirations", disait un militant rencontré lors d'une manifestation à Jérusalem.
Devant le manque de réaction concrète de l'Autorité palestinienne face aux frappes à Gaza, les habitants de Cisjordanie soutiennent, pour la plupart, le parti politique du Hamas, mais aussi ses combattants des brigades Ezzedine Al-Qassam qui envoient des roquettes contre l'Etat israélien.
Pour faire face au mécontentement de son électorat, le Fatah, la formation politique à laquelle appartient Mahmoud Abbas, essaye de "sauver les apparences", estime Julien Salingue. "Il y a eu des appels à manifester via le Fatah. Mais sur le fond, cela ne change rien à la stratégie d'Abbas, qui est la collaboration avec Israël." Certains manifestants, les plus radicaux, ont été violemment repoussés par les forces de l'ordre palestiniennes lorsqu'ils tentaient se s'approcher de barrages de l'armée israélienne. Cette répression a parfois été perçue comme une trahison contre le peuple palestinien de Gaza.
Des négociations sans le Hamas. Sur le front diplomatique également, la division a été de rigueur. Mahmoud Abbas s'est impliqué dans les négociations du Caire, mais le parti du Fatah, auquel il appartient, s'est un peu trop avancé. Lors du premier round de discussions le 15 juillet, un représentant du Fatah s'était dit favorable à une trêve, alors que le Hamas et le Djihad islamique (deuxième force de la bande de Gaza) ont déclaré n'avoir même pas été consultés. L'occasion parfaite pour les (nombreux) détracteurs d'Abbas de ressortir leurs critiques sur la proximité et la collaboration d'Abbas avec l'Etat d'Israël.
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Abbas trop proche du Hamas, pour Tel Aviv. De l'autre côté de ce conflit, les paroles d'Abbas, affirmant son soutien inconditionnel et la dénonciation d'un "génocide" en cours à Gaza, ont fâché l'Etat hébreu. Dans une tribune au site américain Foreign Policy, l'ancien ministre israélien de la Défense Danny Danon critiquait vivement la position de l'Autorité palestinienne : "Le fait est que nous ne pouvons plus continuer à retirer nos forces de sécurité et nous reposer sur l'Autorité palestinienne pour assurer la sécurité des Israéliens", écrit-il.
En fait, Israël entend mettre fin au récent mais important rapprochement entre l'OLP et le Hamas, conclu au mois d'avril. Le Hamas de Gaza et l'OLP de Cisjordanie ont formé pour la première fois depuis 2007 un gouvernement commun, scellant une première réconciliation entre les deux frères ennemis. Cette nouvelle a fortement déplu à Israël, qui considère le Hamas comme une organisation terroriste.
Pire encore, du point de vue de l'Etat hébreu, un représentant du Fatah a pris part à une délégation palestinienne pour aller négocier au Caire. Problème : non seulement des hommes du Hamas participaient à cette négociation, mais également des membres du Djihad islamique, qui ne reconnaît ni l'existence d'Israël, ni même celle de l'Autorité palestinienne, considérée comme traître à la cause.
Entre le marteau et l'enclume, l'OLP "tente de sortir par le haut", selon Julien Salingue. Et d'obtenir une proposition de trêve durable cosignée par le Hamas et Israël.