L'étau se resserre et l'échéance se rapproche. Et cela risque d'être explosif. L'armée syrienne, qui a achevé dimanche son déploiement autour d'Alep, bombardait et livrait bataille aux insurgés dans la ville avant de lancer l'offensive finale, décisive pour le contrôle de cette métropole du nord de la Syrie.
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L'aviation a bombardé les quartiers de Char et Sakhour (est), tandis que celui de Salaheddine (ouest), bastion rebelle assiégé par l'armée, était la cible de tirs d'artillerie. "Un hors d'œuvre", assurent les forces de sécurité du régime, qui martèlent que la bataille n'a pas encore réellement commencé. "Tous les renforts sont arrivés et encerclent la ville. L'armée est prête désormais à lancer l'assaut décisif mais attend les ordres", a affirmé une source de sécurité citée par l'AFP. "Cependant la guerre risque de durer car il va y avoir des batailles de rues pour déloger les terroristes".
L'envoyé spécial d'Europe1 était à Salaheddine, au cœur du "hors d'œuvre", avec les rebelles, dans la nuit de dimanche à lundi.
Cachés d'un sniper, dans une cage d'escalier
Mission de reconnaissance à Salaheddine. Notre pic up blanc parcourt difficilement les rues du quartier, obstruées par les gravats des maisons dévastées. Pas d'hélicoptère ce matin, mais l'artillerie qui pilonne, comme tous les jours depuis 16 jours. Devant nous : une épaisse fumée noire, des flammes. C'est un entrepôt de matériel électrique qui vient d'être touché. Au bout de la rue : des snipers de l'armée.
On se réfugie dans une cage d'escalier pour leur échapper. "L'armée libre se cache dans les maisons du quartier, dont certains habitants nous ont laissé les clés, explique le commandant de l'unité. Ce sont les forces d'Assad qui sont exposées, pas nous. Et elles n'ont pas le savoir technologique contre la guerre des rues." Alors l'armée pilonne et pilonne encore, comme si la seule issue était de raser, totalement, Salaheddine.
Un obus tombe à moins de cinquante mètres.
Au milieu de la fumée surgie de nulle part, un homme longe les murs, tenant par la main son fils de huit ans. C'est l'un des derniers habitants à n'avoir pas quitté la rue. "Nous n'avons plus qu'Allah. Si Bachar était un être humain, il ne ferait pas ça".
Un obus tombe à moins de cinquante mètres. Les combattants s'inquiètent, leur chef était parti en repérage. Mais il revient finalement, et ordonne le repli. Mission accomplie : l'unité rebelle a repéré les départs de feu des chars et des snipers, pour venir répliquer dans quelques heures.
"C'est ici qu'a eu lieu la première manifestation contre le régime à Alep, le 1er avril 2011, se souvient un combattant devant la mosquée du quartier. Il y avait cinq manifestants et j'étais l'un d'eux." Cet électricien de 32 ans qui, à l'époque, n'avait pas touché une arme, sera là tout à l'heure, à Salaheddine, pour lancer ses propres roquettes face aux tanks qu'il a repéré, pour défendre, maison par maison s'il le faut, son quartier, au cœur même de la révolution syrienne.