700 jours de siège, une ville rasée, puis plus rien. Suite à un accord passé entre l’armée loyaliste et les groupes rebelles qui tenaient Homs, les combats ont cessé dans le centre de la ville. D’autres factions tiennent en revanche toujours quelques quartiers périphériques. Trois bus ont été affrétés aujourd’hui pour évacuer 220 des 1.200 combattants qui laissent derrière eux une ville en ruines. Pourquoi un tel accord a été trouvé, et quelles en sont les conséquences ? Eléments de réponse avec Naïm Kossayer, membre de la coalition de l’opposition syrienne, joint par Europe1.fr.
Les termes de l’accord. Naïm Kossayer précise que l’accord a été passé entre les forces loyalistes et Aljabha Alislamya , un groupe armé proche de l’armée Syrienne Libre. La coalition, représentante du peuple syrien reconnue par les forces occidentales, n’a joué aucun rôle dans les tractations. Aljabha Alislamya , qui détenait de nombreux prisonniers de guerre iraniens et syriens , a monnayé leur libération contre le départ de ses forces du centre-ville de Homs en toute tranquillité.
Pourquoi vouloir quitter la ville ? Après plus de 700 jours de siège, négocier une retraite semble un choix étonnant. En fait, il s’agit d’un choix « pragmatique » selon Naïm Kossayer, qui défend cette option. «"Le régime adoptait la tactique du siège et du bombardement pour économiser ses hommes, une stratégie qui a eu un certain succès. Les rebelles du centre-ville étaient complètement assiégés, sans ravitaillement en nourriture, en armes ou en munitions. Ils ont compris qu’ils ne gagneraient pas la bataille, encore moins la guerre en restant là. Ils ont négocié leur départ pour reprendre des forces et aller combattre ailleurs" explique ce Français né à Homs.
Pourquoi ale gouvernement a-t-il accepté? Côté loyaliste, cet accord a été accueilli très favorablement puisque malgré le siège, l’armée connaissait les difficultés à reprendre Homs par la force. Après des mois de bombardements, la ville est entièrement détruite, et le terrain se prête admirablement bien à la guérilla, très coûteuse en hommes pour une armée régulière.
Est-ce une victoire pour les loyalistes ? Symbolique, oui, militaire, non. Naïm Kossayer voit la reprise d’Homs, « capitale de la révolution », comme une victoire morale, mais en aucun cas militaire. Si en 2012, le gouverneur de la province Ghassan Abdel Al disait : "celui qui contrôle Homs contrôle la Syrie", l’analyse ne tient plus aujourd’hui. En effet, après cette longue bataille Homs ne recèle plus aucune richesse économique. "Elle ne présente qu’un intérêt routier, limité cependant pour l’armée régulière puisqu’elle tenait déjà les voies de communication autour de la ville pendant le siège. De plus, l’accord montre bien que l’armée régulière s’est montrée incapable de reprendre la ville à 1.200 combattants. C’est donc une victoire morale certes, mais en aucun cas militaire", analyse Naïm Kossayer . Homs a tout de même un intérêt majeur du point de vue des ressources naturelles puisqu’elle est traversée par plusieurs oléoducs et gazoducs.
Quel changement dans le rapport de force sur le conflit syrien en général ? La conclusion d’un accord entre les deux camps qui permet d’éviter l’affrontement pourrait être considéré comme un signe de relatif apaisement du conflit. Pour Naïm Kossayer, il n’en est rien : "cet accord est purement pragmatique, il arrange les deux camps. Les loyalistes s’emparent d’un symbole sans combat rapproché et les rebelles mettent fin à un siège épuisant. Sur le rapport de force en revanche, la reprise de Homs souligne des lignes de fracture géographiques dans le conflit syrien. Au centre, les loyalistes dominent. Au nord et au sud, ce sont les rebelles. Reste un nouveau front qui vient d’être ouvert par les révolutionnaires sur la côte, on ne sait pas encore qui va l’emporter."