La diplomatie onusienne est toujours aussi impuissante. Une nouvelle fois, la Russie et la Chine ont opposé leur veto jeudi au Conseil de sécurité de l'ONU à une résolution occidentale menaçant le régime syrien de sanctions.
Il s'agit du troisième double veto russo-chinois aux tentatives de l'ONU pour faire pression sur Damas depuis le début du conflit en Syrie, il y a seize mois. Les deux premiers datent d'octobre 2011 et de février 2012.
Le Royaume-Uni est "consterné"
Sur quinze pays membres, la résolution a recueilli onze voix pour, deux contre et deux abstentions. Une décision qui a provoqué la colère des diplomates européens. "Le Royaume-Uni est consterné par le veto de la Russie et de la Chine", a déclaré l'ambassadeur britannique Mark Lyall Grant, accusant les deux pays de "mettre leurs intérêts nationaux avant la vie de millions de Syriens".
Ce nouveau blocage à l'ONU intervient alors que les combats font rage dans la capitale syrienne entre les forces régulières et l'opposition armée.
La menace de sanctions économiques
Le projet de résolution occidental, déposé par la France, les Etats-Unis, l'Allemagne, le Portugal et le Royaume-Uni, brandissait la menace de sanctions économiques contre Damas si les forces syriennes ne cessaient pas d'utiliser leurs armes lourdes contre l'opposition dans les dix jours.
Il prolongeait aussi pour 45 jours la mission des 300 observateurs de l'ONU en Syrie (Misnus), déployés depuis mi-avril mais qui ont suspendu leurs activités en juin en raison de la poursuite des combats. Le Conseil doit encore prendre une décision sur le sort de la Misnus avant vendredi minuit (4h GMT), date à laquelle expire le mandat de 90 jours de la mission.
Etats-Unis : le Conseil a "échoué"
Le veto russo-chinois au Conseil de sécurité "met en péril" la médiation de Kofi Annan, a pour sa part déclaré l'ambassadeur français Gérard Araud, après ce nouveau blocage.
Pour Gérard Araud, "il est clair que la Russie ne vise qu'à laisser plus de temps au régime syrien pour écraser l'opposition". Pour Moscou et Pékin, a-t-il ajouté, "on est semble-t-il toujours trop dur avec les dictateurs sanguinaires".
Les Etats-Unis considèrent, de leur côté, que le Conseil de sécurité de l'ONU a "totalement échoué" dans la crise syrienne et veulent travailler "en dehors du Conseil" pour faire pression sur Damas, a déclaré l'ambassadrice américaine Susan Rice.
Une intervention militaire
Dans le camp russe, on affirme que la résolution occidentale "ouvrait la voie" aux sanctions et à une intervention militaire, a expliqué l'ambassadeur russe Vitali Tchourkine pour justifier le veto de Moscou. La Russie a également rédigé son propre projet de résolution. Il propose de prolonger le mandat de la Misnus pour 90 jours et ne contient pas de menace de sanctions. On ignore si Moscou envisage de soumettre son projet aux voix, et quand.
La situation s'enlise donc sur le plan diplomatique alors que jeudi, la situation est de plus en plus tendue à Damas. Pour la première fois, le quartier de Qaboun dans la capitale a été pris d'assaut par des chars de l'armée syrienne, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Les "craintes de massacres" n'ont jamais été aussi grandes.