Il jongle sans arrêt entre ses trois téléphones portables. Sur le canapé de son salon, Broulaye Keita, 62 ans, tente d’appeler Tombouctou plusieurs fois par jour depuis Montreuil. Profitant du putsch à Bamako contre le président Amani Toumani Touré le 22 mars, les rebelles touareg et des groupes islamistes ont pris lundi le contrôle de cette ville du nord du Mali. Et l'inquiétude est forte parmi la communauté malienne installée en France.
Cette fois, l'interlocuteur de Broulaye Keita décroche. Son beau-frère est à l’autre bout du fil. "Est-ce que vous pouvez travailler ? Est-ce qu’ils se sont attaqués aux femmes ?", l’interroge-t-il.
"C’est eux qui font la loi"
Son beau-frère lui raconte que les femmes sont désormais enfermées à la maison. "Ils ont appelé tout le monde à la mosquée pour dire qu’ils étaient venus appliquer la charia, que désormais toutes les femmes doivent êtres couvertes. C’est eux qui font la loi. Je n’imaginais pas que cela pouvait atteindre ce point-là", raconte Broulaye Keita sur Europe 1.
"On est là, on attend la mort"
Chez Ramata Coulibaly, la télévision malienne tourne aussi en boucle. A l’image, un militaire en uniforme mais elle n’y prête même plus attention. Personne ne sait ce qui se passe dans sa ville natale, Gao. "Avec ces personnes-là, on peut s’attendre à tout. On est dans l’angoisse", confie-t-elle à Europe 1. "Ils prennent tout ce qui se trouve dans les maisons. Tout le monde est terré, personne ne peut sortir. Ma cousine m’a dit : ‘on est là, on attend la mort’ ", conclut Ramata Coulibaly.
A chaque coup de téléphone, l’angoisse monte pour ces familles vivant en France. Elles craignent désormais que les lignes soient coupées et qu’ils n’aient plus aucun contact avec leurs proches.